Contre les incinérateurs et le monde qui les produit

L’incinérateur n’est qu’un exemple de comment la logique du profit est une logique de l’absurde. L’installation de Ischia Podetti [village près de Trento] est présentée comme la réponse nécessaire à la production de déchets : en réalité, pour rentabiliser son fonctionnement, il faudra une quantité encore plus grande de déchets, qu’on fera aussi venir pour cela d’en dehors de la région et qui seront brûlés moyennant finance. En somme, c’est une bonne affaire pour ceux qui le construisent et le gèrent. Quant à tous les autres, il leur restera la dioxine et les autres substances toxiques à respirer et à ingérer, en fonction du cycle de l’eau.

Si le but était vraiment celui de résoudre le problème des déchets, on l’affronterait en amont, en diminuant la production de plastique et en en réduisant la consommation, ce qui est tout autre chose que le palliatif ridicule que constitue le tri sélectif. En fait, le problème des déchets n’est pas une affaire technique à résoudre sur le mode économiquement le plus avantageux, mais bien un problème de société : il s’agit de s’interroger sur ce qu’on produit, comment et pourquoi. De se rendre compte que le modèle techno-industriel est en train de détruire notre autonomie et d’empoisonner toute forme de vie.

Ainsi, s’il est nécessaire de s’opposer à l’incinérateur, cela ne suffit pas. S’il est rentable pour les géants de l’industrie de produire d’inutiles montagnes de plastique (c’est-à-dire vendre et transformer le pétrole, c’est-à-dire faire la guerre), ils le feront. Si c’est une bonne affaire pour les administrateurs et les entreprises qui remporteront l’appel d’offre de construire un incinérateur (c’est-à-dire d’augmenter la quantité de déchets, c’est-à-dire leur marché), il tenteront de le construire en convainquant les gens que l’unique alternative serait des décharges polluantes. Ils ont créé les causes et ils nous vendent les remèdes. La notion d’ “ impact environnemental ”, ce sont eux qui l’ont inventée avec leurs critères et les experts à leurs bottes. Pour ces derniers, il ne faut jamais s’en faire. Ne disent-ils pas que tout est sous contrôle, même après Seveso, même après Tchernobyl ?

Nous ne devons pas descendre sur leur terrain en formulant des réponses différentes aux mêmes problèmes. Nous devons changer les questions. Des déchets domestiques aux déchets industriels, des résidus radioactifs aux biotechnologies, cette société produit des choses qu’elle ne sait ni gérer ni contrôler. Et ses garanties scientifiques sont de vraies superstitions.

Ce n’est qu’en modifiant les causes que nous pourrons arrêter les conséquences. Avant tout, en reprenant la parole et la rue, et en démontrant, comme cela s’est produit à Acerra, que nous ne sommes pas des consommateurs de pacotilles marchandes et de mensonges, mais des femmes et des hommes qui veulent décider en notre nom de tout ce qui regarde notre propre vie. S’il y a quelque chose à incinérer, c’est l’habitude de la délégation et de la passivité. Et y mettre un terme est possible.

Quelques anarchistes

[tract distribué lors d’une réunion publique sur l’incinérateur de Ischia Podetti le 29 décembre 2004]