(fr) Notes sur les sommets
et contre-sommets
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Date Fri, 22 Aug 2003 22:50:17 +0200 (CEST)
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[Du 10 au 14 septembre, aura lieu le sommet de l'OMC - organisation
mondiale du commerce- à Cancun (Mexique). Auparavant, du
4 au 6
septembre, les ministres des affaires extérieures de l'union
européenne
se réuniront à Riva del Garda, une petite ville
de la région du Trentino
(nord de l'Italie), afin d'adopter une position commune. Des anarchistes
de Rovereto -la "grande ville" la plus proche de Riva,
avec Trento - ont
rédigé le texte ci-dessous à propos des sommets
en général et de
celui-ci en particulier, que nous avons traduit]
Lillusion dun centre
Le capitalisme est un rapport social et pas une citadelle des
puissants.
Cest en partant de cette banalité quon peut
affronter la question des
sommets et des contre-sommets. Représenter la domination
capitaliste et
étatique comme une sorte de quartier général
(sagissant du G8, de lOMC
et de nimporte quel autre organisme similaire) est fonctionnel
pour
ceux qui voudraient opposer à un tel centre de décision
un autre centre
: les structures politiques du soi- disant mouvement ou, mieux,
leurs
porte-paroles. En somme, cest fonctionnel pour ceux qui
proposent
simplement un changement de personnel dirigeant. Cette logique,
en plus
dêtre réformiste dans son essence et dans ses
fins, se révèle
collaborationniste et autoritaire dans ses méthodes, puisquelle
vise à
centraliser la contestation. De là découle lintérêt,
pour ces opposants
de gauche si impatients dêtre entendus par les maîtres
de la terre,
dinvestir de largent et de faire un battage politique
autour des
sommets dans lesquels les puissants se donnent de plus en plus
souvent
rendez-vous, avec leurs comparses. Quau cours de ces sommets
il
sagisse simplement de formaliser des décisions prises
ailleurs ne
perturbe certainement pas les différents représentants
des social
forum : du reste, même leur opposition est totalement
formelle,
consistant en des séminaires payants dans lesquels on démontre
que le
néolibéralisme a tort et que lhumanité
a raison ou, pour les plus vifs,
en quelque performance combative opportunément accordée
par la police.
Dailleurs, comment une contestation subventionnée
par les institutions,
représentée par des conseillers municipaux et des
parlementaires, et
protégée par les fossoyeurs historiques du mouvement
ouvrier (on fait
référence ici au service dordre confié
à la Cgil en collaboration avec
les flics) pourrait-elle être réelle ? Le paradoxe
est quon appelle les
gens à descendre dans la rue au nom dun autre monde
possible, avec
pourtant lintention... quil ne sy passe absolument
rien. Chaque fois
quune foule plus ou moins océanique se déplace
placidement, surveillée
à vue, on crie que cest une grande victoire pour
le mouvement. Pourtant
ces pacificateurs sociaux savent très bien que leur capacité
à se poser
comme des interlocuteurs des institutions ne dépend pas
tant du nombre
de personnes quils rassemblent dans la rue (des millions
de
manifestants contre la dernière agression militaire contre
lIrak nont
pas beaucoup préoccupé les gouvernements impliqués
dans la guerre), mais
plutôt de la force de médiation et de répression
quils réussissent à
mettre en pratique ou à justifier contre
toute rébellion sociale. En
fait, si on parle tant des sommets et des contre-sommets, si les
représentants des social forum sont accueillis aux tables
des
négociations et flattés par les médias, cest
uniquement parce quà
Seattle pour la première fois puis à dautres
occasions, il sest passé
quelque chose : des milliers de compagnons et de jeunes pauvres
ont
attaqué les structures du capital et de lEtat, ont
renversé les plans
policiers de lurbanisme ouvrant des espaces de communication
et se sont
affrontés avec les serfs en uniforme. Sans cette menace
subversive
signe, au même titre que les nombreuses explosions insurrectionnelles
qui ont secoué les dernières années, de lépoque
dans laquelle nous
sommes entrés les dirigeants ne sauraient que faire
des différents
Casarini et Agnoletto. Ne sest-il pas passé quelque
chose didentique
avec les syndicats ? Ecoutés et engraissés par le
capital lors des
périodes de grande conflictualité sociale dans le
but de diviser,
démoraliser et dénoncer les prolétaires rebelles,
ils ont été rangés au
grenier dans des temps plus récents ; cest pour cela
quils sont
maintenant contraints de gueuler à nouveau contre ces attaques
patronales quils ont eux-mêmes justifiées et
ratifiées.
Les porte-paroles désobéissants doivent
alors se distinguer des
mauvais, des extrémistes, des violents (cest-à-dire
de ceux qui
pratiquent laction directe) et donner une visibilité
politique aux
autres. Dun côté, donc, les slogans des différents
social forum
conviennent parfaitement aux bourgeois éclairés
: taxation du capital
financier, règles démocratiques et transparentes
sur le commerce global,
plus dEtat et moins de marché, consommation critique,
banques éthiques,
pacifisme, etc. Dun autre, ce quils vendent avec leurs
mobilisations
démocratiques est une marchandise précieuse
: lillusion de faire
quelque chose contre les injustices du monde. Les contre-sommets
sont,
en ce sens, un savoureux spectacle. Les quelques méchants
réprimés et les
gentils écoutés dans leurs justes revendications
: fin du conte ?
La domination sait que ce nest pas si simple. Les propositions
si
dégoûtantes de réalisme de lopposition
domestiquée ne disent absolument
rien aux millions de pauvres parqués dans les réserves
du paradis
marchand et réprimés par la police. Une nouvelle
preuve, petite, en a
été donnée à Gênes : cest
uniquement aux cours des affrontements et des
saccages de supermarchés que les jeunes des quartiers prolétaires
se
sont joints aux autres insurgés. Tandis que les Tute Bianche
avec leurs
kermesses apparaissaient à leurs yeux comme des martiens
et des
bouffons, ces exclus de tout racket politique ont tout de suite
compris
le langage de la révolte.
Un souffle dimprévisibilité
Il ny a pas de doute quà Seattle et à
Gênes, comme à Salonique plus
récemment, sest manifestée une critique sans
médiations de la domination
et de tous ses faux ennemis. Malgré le fait que léchéance
ait été fixée
par les dominants, la gestion de la rue par les réformistes
a échouée.
Nous disons ceci, tout en ayant été parmi les compagnons
qui soutenaient
que Gênes est partout : que si la domination et la dépossession
sont
dans chaque partie de la société et de la vie quotidienne,
lattaque na
pas besoin de rendez-vous fixés par lennemi. Nous
avons trouvé
intéressante la pratique de ceux qui, désertant
la mise en scène dune
zone rouge à violer et le piège de laffrontement
frontal avec les
flics, se sont bougés en frappant et en disparaissant avec
agilité
(lassaut contre la prison de Marassi à Gênes
fut, en ce sens,
remarquable). Ce puissant souffle dimprévisibilité,
ce fédéralisme
subversif des actions et des groupes a marqué une rupture
importante
davec la logique de ceux qui centralisent lennemi
pour centraliser (et
rendre symbolique) la lutte. Nous pensons toutefois quêtre
présent là
où lennemi ne tattends pas, loin des échéances,
reste une meilleure
perspective. Les contre-sommets, même dans leurs aspects
les plus
intéressants, limitent cette perspective. En outre, sans
rien retirer,
répétons-le, aux explosions de Seattle et Gênes,
il semble que la
poursuite de telles échéances soit devenue un cliché,
qui plus est
dévoreur dénergie : un contre-sommet terminé,
il sen prépare un autre.
Se sont toujours plus les médias qui fixent les échéances,
au point que
si de nombreux révolutionnaires ont par exemple manifesté
contre la
guerre en Irak, presque personne na réussi à
exprimer une quelconque
solidarité pratique avec les insurgés dArgentine
ou dAlgérie. On prête
souvent plus dimportance aux affrontements qui impliquent
quasi
exclusivement des militants quaux authentiques
émeutes sociales et de
classe.
Nous connaissons très bien les raisons pour lesquelles
de nombreux
compagnons se rendent aux contre-sommets : laction directe
diffuse et
laffrontement généralisé avec les flics
ne sont possibles quen
situations de masse. Etant donné que la perspective dattaquer
ailleurs
est extrêmement minoritaire, cest uniquement en situations
plus
élargies quon peut expérimenter une certaine
guérilla de rue. Les
autres actions peuvent être réalisées à
tout moment, sans
incompatibilité avec certaines pratiques de rue au cours
des
contre-sommets. Pourtant, nous croyons quà la longue
une telle pratique
limite lautonomie danalyse et daction (combien
de conflits sociaux
nous sommes-nous contentés de regarder passer ?), se transformant
malgré
soi en une sorte de version extrémiste à lintérieur
de la pétaudière
des Désobéissants. Sans compter que ce serait
aussi loccasion de se
demander peut-être pourquoi le pouvoir publicise ainsi tant
de sommets
dans lesquels sont entérinées des décisions
déjà prises. Tout ceci
semble un grand terrain détude et dexpérimentation
de techniques de
contre-émeutes de la part des policiers. Une sorte de traitement
homéopathique : la domination sinocule le virus de
la subversion à
petite dose pour renforcer ses propres dispositifs immunitaires
en vue
dune contagion sociale plus vaste. Ils doivent savoir comment
se
meuvent et sorganisent les mauvais, et avec quels bons il
est possible
de dialoguer afin que rien ne change réellement.
Une expérimentation à ciel ouvert
Mais les sommets constituent par-dessus tout un autre type
dexpérimentation : voir quel est le degré
de vexations que la
population est disposée à endurer. Portant dans
le riche Occident un
bout de Palestine, avec ses check-point, ses zones rouges permanentes
et
ses blindés à chaque coin du rue, la domination
passe en informant ses
citoyens que, jusquà preuve du contraire, ce sont
tous des délinquants
; que rien nest assez sûr pour lappareil policier
et technologique ;
que lurbanisme est la continuation de la guerre sociale
par dautres
moyens. Il y a plus de 70 ans, Walter Benjamin écrivait,
dans ses Thèses
sur le concept dhistoire, que «létat
dexception dans lequel nous
vivons est devenu la règle». Si ceci est vrai, nous
devons comprendre ce
qui relie un camp pour immigrés sans papiers aux stades
dans lesquels
sont entassés les réfugiés de guerre, certains
quartiers populaires
occupés par la police aux différents Guantanamo
éparpillés à travers le
monde, certaines opérations dévacuation absolument
disproportionnées
par rapport aux objectifs déclarés (des quartiers
entiers évacués pour
désamorcer quelque engin de la première guerre mondiale)
aux
rationnements en électricité effectués sans
préavis comme sous le
fascisme par lEnel (1). Jusquici il sagit
dexpériences réussies,
qui confirment bien ce quécrivait un compagnon dans
les années 70 : le
peuple du capital est un peuple de stoïques. Ils bouleversent
la
circulation dans les villes, mettent des caméras de surveillance
partout, installent des antennes nocives sur les toits des maisons,
criminalisent toujours plus les comportements : personne ne bronche.
Les sommets sont la représentation concentrée de
tout ceci, la suspension
juridique de tout droit. «Quest-ce qui arrive ?»,
se demande le citoyen
moyen, contraint demprunter un trajet insolite pour aller
faire ses
courses. «Rien, ce sont les No Global», lui répond
la dame du
supermarché. Pendant quils privatisent même
leau quil boit, et que la
police est partout.
Mais cest justement parce quil sagit de la représentation
concentrée
dune situation quotidienne, que la critique pratique du
contrôle social
doit être constante et diffuse, par exemple à travers
la destruction des
caméras et autres systèmes de surveillance électronique.
Il est
important de réaliser la carte de la localisation des appareils
de
contrôle, de diffuser leur connaissance et de soutenir théoriquement
la
nécessité de les attaquer.
La nouvelle gueule de la domination
Le pouvoir est toujours plus impudent. Dun côté,
les patrons savent que
les conditions sociales actuelles, placées toujours plus
sous le signe
de la précarité et dépendantes des marchandises,
ne peuvent être
imposées quà travers la terreur : cette terreur
se manifeste à
lextérieur sous forme de guerre, à lintérieur
sous forme de peur du
futur (par exemple de rester sans travail) ou à travers
la répression de
couches sociales toujours plus vastes. Dun autre côté,
des décennies de
pacification sociale dans lesquelles chaque ignominie est
passée pour
la simple raison quil ne sest rien fait pour empêcher
la précédente,
en une accélération inouïe de labjection
ont donné aux dominants une
arrogance sans précédent. Nous lavons vue
à luvre par exemple à Gênes
dans les tabassages, les tortures, lassassinat de Carlo
Giuliani. Et ça
continue. Le nouveau préfet de Trento est Colucci, préfet
de Gênes au
cours du G8, charogne patentée. Ce sera à lui de
gérer le sommet des
ministres des affaires extérieures de lUnion Européenne
qui se tiendra à
Riva del Garda, entre les 4 et 6 septembre prochains. Bien compris,
le
message ? Un comité du Trentino pour la vérité
et la justice na rien
trouvé de mieux à faire que de linviter à
un débat public
contradictoire.
Pluies acides et feuilles de figue
Les ministres des affaires extérieures qui se rencontreront
à Riva entre
les 4 et 6 septembre devront parvenir à élaborer
une sorte de
plate-forme commune à présenter au sommet de lOMC
de Cancun, au
Mexique, du 10 au 14 septembre. Le thème est celui de lAccord
général
sur le commerce et les services (GATS en anglais) qui prévoit,
précisément, la libéralisation à un
niveau mondial des principaux
services publics. Parmi les nombreuses décisions
en cours, la plus
scandaleuse est sûrement celle de la privatisation de leau,
qui pourrait
devenir une réalité pour les 144 pays membres de
lOrganisation mondiale
du commerce. Il sagit dun processus entamé
depuis longtemps, étant
donné que sept multinationales se disputent depuis des
décennies la
concession dembouteiller leau minérale, et
ces dernières années
également celle de gérer les aqueducs. Il
Tavolo trentino per unEuropa
sociale (Table de la région du Trentino pour une
Europe sociale)
insiste elle aussi sur la privatisation de leau et sur sa
pénurie due à
la pollution, comme un emblème du néolibéralisme
le plus effréné. A part
les lamentations habituelles sur laspect non démocratique
de ces
accords (comme si ceux que passe chaque gouvernement de son côté
étaient
sujets, à linverse, à qui sait combien de
débats publics... ; en outre,
ce ne sont donc pas les institutions étatiques qui sont
censées nous
sauver du marché sauvage ?), ce qui est autant scandaleux
dans les
discours de ces réformistes est lécart entre
lampleur du désastre
quils dénoncent et les solutions quils proposent.
Dun côté ils ébauchent comme cause lindustrialisation
de lagriculture,
la concentration des populations dans des villes toujours plus
gigantesques, la pollution rejetée par les usines, le gaspillage
deau
potable pour les machines industrielles ou pour les cultures destinées
aux élevages intensifs danimaux, en somme lessence
même du système
techno-industriel ; de lautre côté, ils proposent...
de nouvelles lois,
des règles transparentes, jusquà transformer
les citoyens en
actionnaires des sociétés qui privatisent leau.
Il y a des pays entiers
dans lesquels, grâce aux merveilles du progrès, un
effondrement du
système bancaire laisserait les campagnes sans eau, et
ces citoyens fiers
de lêtre réclament dautres lois. Un peu
comme si, face à une averse de
pluies acides, on suggérait de se couvrir la tête
avec des feuilles de
figue biologiques. Les propositions des différents social
forum,
raisonnables selon la rationalité politique et marchande,
sont
simplement décervelées du point de vue concret et
social. Il ne sagit
pas de dénoncer un monde en ruine, mais plutôt darracher
lespace pour
résister et le temps pour attaquer. Ce nest pas uniquement
une question
de combien on est radical dans la rue. Le point est quelle vie
on
désire, combien on est soumis matériellement et
spirituellement à un
ordre social toujours plus inhumain et artificiel ou, vice et
versa, pour
quels rapports on est prêts à se battre.
Nul besoin daller à Riva pour sopposer au racket
de leau. Les
responsables directs de cette marchandisation absolue (par exemple
les
grosses firmes qui embouteillent leau minérale) sont
à deux pas de
nous, toujours. Si les civilisés ne sont même pas
en mesure de défendre
leau quils boivent ou au moins de comprendre
que dautres le fassent
dune façon claire et directe , nous pouvons
tous aller nous coucher.
Encore une fois une longue chaîne de dépendances
et de vexations nous
présente aujourdhui un compte exorbitant. Cest
uniquement dans
lautonomie contre la société industrielle
de masse et dans la révolte
ouverte contre lEtat qui la défend que pourra naître
quelque chose de
différent.
La même chose est valable, par exemple, avec la question
des brevets, y
compris ceux sur le code génétique. Face à
lentrée du capital dans le
corps humain, il est tout simplement idiot de réclamer
des lois de
protection opportunes. Le délire techno-scientifique, qui
consiste à
vouloir transformer la nature et les hommes en une sorte de variable
dordinateur, a dépassé depuis longtemps le
seuil de non-retour : toute
illusion de réformer une science entièrement au
service de la domination
nest quune lugubre plaisanterie. Les actions survenues
dans plusieurs
pays contre les cultures transgéniques ou contre les laboratoires
privés
et étatiques qui mènent des expériences sur
le génome humain ont bien
démontré que la critique de la raison mercantile
na pas besoin
déchéance spectaculaire.
Plus généralement, ce que lon définit
en un euphémisme comme
mondialisation serait impensable sans la base matérielle
fournie par
lappareil technologique. Pensons simplement a ce qui est
présenté comme
les facteurs principaux du développement et des guerres
économiques et
militaires : lénergie et linformation. Ce qui
peut sembler un Moloch
inattaquable est en réalité un gigantesque réseau
formée de câbles,
dantennes, de relais, de pylônes et de répétiteurs
facilement
frappables.
Riva est partout
Cest la Cgil qui va soccuper du service dordre
au cours du
contre-sommet de Riva. Le préfet sortant de Trento a précisé
justement
que plus les manifestants se feront policiers, moins il
y aura besoin
de ces derniers.
Après de longues négociations entre le social forum
et la préfecture
(gérées évidemment par les leaders nationaux),
il semble que la mairie
mettra à disposition des Désobéissants
et compères un palais des
sports en dehors de Riva, leur concédant le droit de manifester
(toujours hors de la ville, dans des rues désertes) le
dimanche. Riva
sera fermée, ce qui signifie pour les flics bloquer trois
routes
daccès. Le commissaire du gouvernement a ordonné
dinterdire ou de
suspendre toute manifestation dans plus de vingt communes du Trentino
(y
compris les manifestations culturelles et sportives). La police
veut des
routes libres, la population doit comprendre que le Grande Fratello
(2)
nest pas seulement une série télévisée.
Et nous ?
Reprenons un fil qui vient de loin. Günther Anders écrivit
dans les
années cinquante «Hiroshima est partout» et
dans les années quatre-vingt
«Tchernobyl est partout». Quelques rebelles au monde
technologisé
disaient dans les années quatre-vingt-dix «Mururoa
est partout» (à
lépoque où le gouvernement français
soumettait cette île du Pacifique à
des essais nucléaires assassins), dautres compagnons
répétaient il y a
deux ans «Gênes est partout». Pour que la révolte
explose sans limites
et contre tout spectacle, pour que lAppareil attende un
ennemi qui
nest pas là et révèle encore plus son
caractère totalitaire, nous
disons Riva est partout. Nous ne serons pas dans la rue contre
le sommet
de lUnion européenne, parce quavec les luttes
de ces dernières années
et avec celles à venir, nous voulons emprunter dautres
routes. Parce
que suivant la logique «cette fois cest à côté
de chez moi» on ne sort
pas du cercle, du moment que les sommets se déroulent toujours
près de
chez quelquun. Parce que le conflit réel est ailleurs.
Il y a dautres
modes pour sopposer au blindage de la ville et des vallées
dans
lesquelles on vit, modes à la portée de tous. Nous
voulons nous libérer
de la dictature du Nombre et de ses adorateurs. Nous savons que
cest
une perspective qui donnera peut-être de faibles résultats
dans
limmédiat, mais cest en décidant comment,
où et quand frapper, et en
défendant avec fermeté les raisons, que nous ferons
avancer
linsubordination individuelle et sociale.
Quelques anarchistes de Rovereto (3)
(1) Avec le prétexte de la sécheresse cet été,
lEnel (EDF italienne) a
pratiquée des coupures sauvages.
(2) Nom italien de lémission américaine Big
Brother, qui a donné Loft
Story en France.
(3) Rovereto est une ville non loin de Riva del Garda.
[Traduit de l'italien par CS. Note : certains termes sont en
italique, ce
que la version internet ne permets pas de rendre]