Premier Communiqué
Déclaration
de Silvano Pelissero
depuis la prison de haute sécurité de Novara
A la société civile, aux compagnons anarchistes,
aux communistes, aux verts, rouges, noirs, à ceux qui ont
tout ou rien compris, à ceux qui ne s'intéressent
à rien, à tous ceux qui sont au contraire conscient
de changer le
cours de l'histoire.
Novara, 5 mai 1998
Moi, Silvano, fils de Bruno (...), je confirme et souligne être
anarchiste, insurrectionnaliste et individualiste. Je
parle en mon nom et non au nom de Soledad ou d'Edo. J'insiste
sur l'évidence de mon incompatibilité avec
n'importe lequel de vos modes de vie. Avec le système du
travail salarié et du respect de la propriété
et de la
richesse de n'importe quelle manière fut-elle acquise.
Je met en évidence mon hostilité envers le projet
TAV, en
Italie comme en France, comme en Allemagne ou ailleurs. Je suis
hostile au tourisme que cela soit sur les neiges
du Val de Susa ou sur celles du Val d'Aoste, autant que sur les
plages du Cancun au Mexique. Je me déclare
hostile à n'importe quel usage de l'énergie nucléaire
ainsi qu'à l'usage exagéré et hors de propos
de l'automobile. Je
suis hostile et incompatible avec toute forme d'autorité
du "grand-père" dans la caserne, à celle
du magistrat qui
condamne ou absout selon son caprice, au flic qui fait son devoir,
au chef d'entreprise, à l'enseignante à l'école
du
devoir.
Fondamentalement, je n'arrive pas à voir un espace praticable
pour mes impératives exigences libertaires,
dans votre société ainsi appelée civile et
de la paix à tout prix. Je ne réussis pas à
voir un seul espace de dialogue
avec la majorité, qui, désormais depuis un siècle,
a mesquinement tourné le dos à la Terre au nom d'une
infamie qui
justifie tous les désastres : le Progrès !!
Mais je nie avec fermeté tout rapprochement, même
marginal dans n'importe quel attentat en Val de Susa ou
ailleurs. Je nie et rejette obstinément toute implication
ou complicité à l'égard d'un groupe appelé
Loups Gris ou de
n'importe quel autre groupe d'autre sorte. L'idée d'un
groupe détonne et est incompatible avec mon caractère
individualiste et réservé, je dirais presque hermétique.
Je conclus cette brève déclaration d'éclaircissement,
plus
envers mes camarades qui m'ont manifesté de la solidarité
qu'envers la société civile qui m'accuse d'écoterrorisme,
soulignant que je ne reconnais à personne ni le pouvoir
ni l'autorité de juger mes actions. Je prendrai acte de
la
condamnation prononcée contre moi et qui sera suivie seulement
et exclusivement en vertu d'une force numérique
et technique supérieure !!
Et que chacun pense ce qu'il veut et fasse ce qui lui convient.
Qui veut restera proche de moi et qui ne le
souhaite pas m'évitera avec horreur comme si j'étais
un démon sortie de je ne sais quelle fosse de l'enfer social.
Silvano
(Aucun nom parce que cela n'a pas d'importance et que les noms
servent seulement au fichage)
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Entre 1996 et 1998, des actions hostiles au
TAV (= le train à grande vitesse italien) sont menées
dans le Val
De Susa, elles vont d'attaques contre les entreprises chargées
de préparer le chantier à diverses actions de
sabotages contre les travaux, de l'incendie d'une mairie à
de simples publications de tracts. Le 5 mars 1998, les
anarchistes Silvano Pelissero, Edoardo Massari et Soledad Maria
Rosas sont arrêté-e-s par la Section Spéciale
des
carabiniers, sous l'inculpation d'appartenance aux "Loups
Gris", la mystérieuse organisation ayant revendiquée
une
partie des actions. Soledad, d'origine argentine, n'était
même pas en Italie au moment des faits. Ils/elle sont accusé-
e-s d'"association de malfaiteurs et tentative de renversement
de l'ordre démocratique", et les juges prétendent
ainsi
avoir bouclé l'enquête. Des actions de solidarité
avec les arrêté-e-s se succèdent à
Turin et dans le Val de Susa alors
que se met en place une campagne de calomnie orchestrée
par la presse locale et nationale. Le 28 mars 1998,
Edoardo est retrouvé pendu dans sa cellule de la prison
des Valettes à Turin. La cellule est mise sous scellés.
Le
ministre de l'Intérieur et le chef de la police contactent
le préfet de Turin, inquiets des réactions que cette
mort peut
engendrer. Mais la nouvelle de la mort d'Edo se diffuse rapidement
et des actions prennent place le jour même.
Silvano et Soledad débutent une grève de la faim.
Des actions de solidarité se multiplient, à Turin,
à Bologne, mais
aussi aux Pays basques. En juillet, c'est Solé qui est
cette fois retrouvée morte dans la "communauté"
où elle était
assignée à résidence...
Des trois anarchistes arrêté-e-s suite de l'affaire
des Loups Gris, seul Silvano est encore en vie. Aucune
preuve sérieuse n'a jamais été apportée
pour appuyer sa condamnation à 7 ans. Au contraire, certaines
des preuves
ont été démontées. Mais il a toujours
affirmé être anarchiste, insurrectionnaliste, et
fermement opposé au TAV. C'est
suffisant pour que les magistrats concluent l'enquête montage.
Bilan : meurtre légal de deux compagnons et
enfermement arbitraire d'un troisième.
Alors qu'il n'avait même pas encore été adopté,
le projet du TAV avait déjà le sang de deux
compagnons sur les mains. Silvano fait toujours les frais d'un
projet criminel que les habitant-e-s du Val de
Susa refusent en masse.
Son procès en appel s'est terminé le 28 janvier
2001, et sa peine de prison a été réduite
de 4 mois... mais il
doit encore passer devant les tribunaux et répondre de
2 affaires. Actuellement, Silvano a décidé de passer
devant la
cour de cassation, Rome. Le procès en appel pas plus que
celui en première instance n'a exposé les "preuves
en
granites" auxquelles un des magistrats fantasmant sur une
condamnation lourde faisait référence.
Pour la justice italienne, il s'agit à grand renfort de
montages de donner une réponse judiciaire à la résistance
quotidienne de ceux et celles qui ne laisseront pas le rouleaux
compresseur capitaliste les écrabouiller... La détention
de Silvano, la volonté délibérée de
le maintenir enfermé, n'ont jamais atténué
ni la résistance au TAV ni les actions
revendiquées par des anarchistes. En attendant le jour
où ce sera au tour de la justice italienne rendre des comptes,
Silvano a besoin de solidarité, notamment financière,
pour son procès en cassation contre l'État. Pour
tous dons,
vous pouvez envoyer à l'ABC-Dijon qui retransmettra. Toutes
initiatives sont les bienvenues.
Silvano est actuellement assigné à résidence
dans une "communauté".
Vous pouvez lui écrire ou lui envoyer des publications
(en français/italien/espagnol) : Silvano Pelissero, Com.
Mastro Pietro, Via Ferrerinoli 2, Sanponso 10080 Torino, Italie.
[Diffusé par l'ABC Dijon]