LES SUITES DU PROCÈS CONTRE SILVANO PELISSERO : LA MAUVAISE PENSÉE

Pour ce procès, le spectacle va en se terminant, les juges gigognes vont rentrer dans leur bureau au milieu de la poussière de leur paperasse en essayant de garder leurs vêtements propres à l'emploi pour une nouvelle représentation. Tout le personnel de piste a bien tenu son rôle. OH ! Il y a bien eu quelques innovations dans ce drame, il faut bien surprendre pour que le public puisse applaudir. Le canevas avait pourant été tout tracé dès les années de plomb : le terroriste fasciste, l'idéaliste, il ne manquait que la repentie. Et là, elle a vécu l'horreur sans jamais tomber dans la bassesse, héroïne des temps modernes et de l'antiquité, dans un vie qui fut dans les temps. La bassesse, elle l'a laissée aux autres. De sa souffrance, elle en a fait du cristal pour trancher dans l'oeil du spectateur.

Mais c'est de la vie d'un humain qui parle dont il est question là-bas en Italie, dans cette communauté glaciale de Maestro Pietro. Le procureur a demandé sept ans d'enfer contre l'anarchiste. Pour le magistrat, les années, les heures, le temps n'est qu'une idée dont il faut se débarrasser. Ce charognard est pour le TGV. Il n'a pas de preuve, sauf la mauvaise pensée de l'inculpé et cela lui suffit. Le but semble atteint. L'opposition anti-TAV, silencieuse depuis les arrestations, laisse la place aux aménageurs de la vie des autres pour leur bien être. Messieurs de la coordination Rhônes Alpes contre le TGV, allez expliquer aux gens du Val de Susa votre envie de Ferroutage, maintenant, ils ne peuvent plus vous en parler, la flicaille à votre service les en empêche. Aménageurs de l'espace et du temps des autres, allez leur dire le progrès. La condamnation de Silvano est à ce prix, la condamnation des habitants ruisselle de vos bonnes pensées, vous pourrez mettre dans vos TGV les photos d'époque.

Mais il serait facile de parler des autres sans se soucier de notre propre cohérence. Concerné(e)s par ce monde qui n'en finit pas de se mettre en place, où la résignation côtoie l'incohérence, la fatalité conseille la faiblesse de nos réactions, on pourrait dire "ne rien faire, c'est laisser faire".

Depuis les quelques manifestations de solidarités aux anarchistes italiens autour des ambassades et consultats italiens (Dijon, Grenoble, Paris, Guingamp, Marseille, Lyon), le procès a suivi son cours sans apparemment être troublé, le ministre des transports Gayssot a officialisé le TGV Lyon-Turin en septembre à Nîmes, la coordination Rhône Alpes contre le train à haute vitesse est restée silencieuse. La solidarité avec les populations opposées au projet du TGV Lyon-Turin, la solidarité aux trois anarchistes du Turin, peuvent peut-être se manifester, soit en organisant une délégation dans les villages de Monpantero de Bussoleno de Caprie, soit en allant au prochain procès le 21 janvier, soit en participant à des "solidarités actives" autour des intérêts industriels et financiers des promoteurs du TGV. En anecdote, on pourrait dire aux amis de Silvano qu'ils arrivent à la fouille pour les procès en Italie avec des objets usuels inefficaces mais en fer pour entendre le doux bruit des détecteurs de métaux. La prochaine journée du procès, le 21 janvier 2000, sera la journée de plaidoirie de la défense.

Mais déjà ce 31 décembre à Turin, pétards et cortèges seront dans et hors des squatts pour en finir avec ce siècle. Les personnes intéressées peuvent y aller. Pour enfoncer le clou, il faut parler du procès des dirigeants des BR qui, à Turin en ce temps-là, a duré fort longtemps tellement était grande la Peur de cette bourgeoisie-là.

CASAIE : 3, rue Pelleterie 26 000 VALENCE.

Extrait de Cette Semaine #79, février 2000, p.12