Témoignage
d'un anarchiste sur les événements du vendredi 20
juillet 2001 à Gênes
Ce témoignage est anonyme pour des raisons de "tranquillité
personnelle". Il concerne uniquement la journée du
vendredi 20 juillet 2001. Il peut être utilisé, reproduit
et diffusé par toutes et tous. Je vais essayer de m'en
tenir essentiellement à ce que j'ai vu, même si,
à l'occasion, il m'arrivera de formuler quelques hypothèses.
Quelques aspects des événements et de leur traitement
médiatique feront l'objet d'un commentaire personnel en
fin de texte. J'invite tou(te)s les anars ayant "assisté"
aux affrontements du vendredi 20 et du samedi 21 juillet 2001
à décrire ce qu'ils/elles ont vu et à mettre
ces témoignages en circulation.
RECIT
DE "MA" JOURNEE DU 20 JUILLET
C'est à partir de 10 heures du matin environ que la majeure
partie du black bloc a commencé à se rassembler
et à se préparer au fond du square Valletta, un
square pas mal boisé qui servait de camping pour les manifestants
anti-G8 près de la via Alvaro. Un hélico de la police
survolait régulièrement le square. Le black bloc
a dû entrer en mouvement vers 11 h 30 approximativement
(je n'avais pas de montre sur moi). Il est sorti du square par
un escalier situé au fond. Il devait y avoir au moins 500
ou 600 personnes vêtues de noir pour une bonne partie d'entre
elles. Certaines avaient des casques (noirs aussi), des barres
de fer, des bâtons, des sacs avec des cocktails Molotov
ou des pierres, des masques à gaz... Les provenances nationales
étaient diverses. Il y avait des petits groupes assez bien
organisés et des individus isolés. Je pense que
la majorité des gens avait entre dix-huit et vingt-cinq
ans. Tout le monde était masqué ou cagoulé.
Nous avons marché dans des petites rues en mettant de grosses
poubelles métalliques et des containers en plastique ou
en métal pour les bouteilles et les papiers au milieu de
la route (il y en avait pas mal dans les rues, tous les 150-200
mètres environ) pour que la police ait du mal à
nous suivre avec ses véhicules. Un hélico nous survolait
régulièrement. Notre destination était le
corso Buenos Aires, où se trouvait la manifestation des
Cobas (un syndicat de base, indépendant, "lutte de
classe", majoritairement marxiste et assez radical d'après
ce que je sais) et du réseau Diritti Globali (assez radical
lui aussi apparemment). Nous avons rejoint la queue de cette manif
de plusieurs milliers de personnes aux environ de midi. Nous avons
alors été rejoints par d'autres participant(e)s
au black bloc. Le black bloc regroupait alors environ un petit
millier de personnes dont pas mal de filles (un cinquième
ou un quart ?). Les gens des Cobas et de Diritti Globali avaient
organisé un service d'ordre (SO) assez nombreux qui a fait
la chaîne pour séparer leur cortège du nôtre.
Il y avait pas mal de gens des Cobas et de Diritti Globali (DG)
qui avaient des casques de moto ou de chantier, des manches de
pioche, des gants, des protections sur les avant-bras, des masques
à gaz ou des foulards et des masques anti-poussière
blancs. Ils étaient plutôt bien équipés.
On ne s'est pas imposés dans leur cortège. Nous
étions attendus et acceptés en queue de manif. Le
black bloc a déployé quelques banderoles, crié
quelques slogans (comme "No borders, no nations, stop deportations"
et "No justice, no peace. Fuck the police !") en anglais,
quelques autres ont été scandé en italien
et allemand. Ça a duré a peu près dix minutes
pour laisser aux gens âgés ou avec des enfants qui
manifestaient dans le cortège des Cobas et de DG le temps
de s'éloigner.
Puis, très vite, la première banque a été
attaquée ainsi qu'une agence immobilière. Des poubelles
et des containers ont été mis au milieu de l'avenue.
La police, qui n'était pas loin, est arrivée et
a pris position pas très loin du black bloc. L'ensemble
de la manif a commencé à descendre l'avenue vers
la mer. Des tambours battaient le rythme au sein du black bloc
(BB). Des policiers ont pris position dans une rue latérale.
Des participants au BB ont commencé à lancer des
pierres. Les flics ont tiré les premières grenades
lacrymo et ont commencé les charges. Il y a eu des jets
de cocktails Molotov et aussi une ou deux fusée de détresse
tirées sur les flics. C'est comme ça qu'ont commencé
les affrontements. Rapidement, la police a chargé en provenance
de plusieurs rues, ce qui a eu pour effet de disloquer la manif
en deux morceaux apparemment. Ce qui est sûr, c'est que
le contact a été perdu avec une partie du cortège
Cobas-DG et une petite partie du BB. Je ne sais pas ce qu'ils
ont fait par la suite. La partie de la manif dans laquelle je
me trouvais est descendue vers la mer avec les flics pas loin
derrière. On continuait à mettre des obstacles en
travers de la route. Je pense qu'on descendait la via Casaregis
et on est vite arrivés devant le Genoa Social Forum, côté
scène de concert. Là, on s'est arrêtés.
Il devait y avoir environ 2 500 personnes, peut-être plus.
C'est pas évident à évaluer.
La majeure partie du BB se trouvait dans ce cortège. On
avait le dos à la mer, les flics en face et il y en avait
aussi qui s'approchaient sur la gauche près du forum, côté
point d'information. On savait plus trop quoi faire. Au bout de
cinq minutes, 150-200 personnes environ du BB ont pris un escalier
assez raide qui mène à un quartier qui surplombe
la place Martin Luther King. Ils sont partis cartonner dans leur
coin (j'y reviendrai plus tard). La majeure partie des gens du
BB sont restés et ont cherché à remonter
le corso Torino en laissant la mer droit derrière eux.
On a remonté le corso Torino sur 200 mètres. Des
vitrines ont été cassées (une banque et un
concessionnaire Fiat plus deux ou trois autres trucs). On a commencé
à construire une barricade. Les flics sont arrivés
en face. Il y a eu des heurts et on a été refoulés
encore une fois vers le forum près duquel les Cobas et
DG étaient restés. Les flics se ramenaient de partout,
à gauche, en face, à droite. On avait plus le choix,
on a été forcés de rentrer dans le forum
qui était presque désert à ce moment-là.
Le SO des Cobas et de DG tenait les grilles. Ils ont laissé
rentrer tout le monde et les ont refermées. En face, les
flics étaient à 50 mètres et tout le monde
s'est mis à barricader la grille avec tout ce qui nous
tombait sous les mains. Il était un tout petit peu plus
de 14 heures (j'ai demandé l'heure). Les flics tiraient
des grenades lacrymo dans le forum et des gens ripostaient en
lançant des pierres, mais les flics étaient trop
loin. Bref, on était cernés et ça sentait
le roussi.
Au bout de dix minutes, des gens ont trouvé un petit chemin
qui longeait la mer. Quelques groupes sont partis reconnaître
le terrain et tester la réaction des flics. Pas de réaction
policière. Du coup, on a quasiment tous filé par
là. Le chemin était pas large et le cortège
s'est étiré. Il a fallu du temps pour que tout le
monde passe. On s'est regroupés du côté de
la punta Vagno puis on est reparti en manif en remontant le corso
Italia, vers l'est donc, en longeant la mer. Un gros mirador et
quelques caméras de l'arrière de la caserne de carabiniers
(qui donne sur le corso Italia) ont été copieusement
lapidés avec les galets ramassés le long de la mer
en sortant du forum. Pour une raison que j'ignore, il y a eu des
engueulades entre des gens des Cobas et d'autres du BB. Ça
a fini en une bousculade où quelqu'un a été
blessé assez légèrement apparemment. Une
ambulance est passée prendre cette personne. Pendant ce
temps-là, les flics sont entrés dans le forum et
ont tout gazé. Les quelques dizaines de personnes qui y
étaient restées n'ont apparemment pas été
embarquées (peut-être quelques-unes ?) et les flics
sont vite ressortis. Nous, on a continué à suivre
le corso Italia jusqu'à une petite église et ensuite
l'avenue a obliqué droit vers le nord. Je crois qu'à
partir de cet endroit le corso Italia devient la via Felice Cavallotti.
Le cortège était calme depuis la caserne. On mettait
juste les poubelles au milieu de la route. A partir de la via
Felice Cavallotti, on a recommencé à rencontrer
des banques. Elles ont systématiquement été
attaquées et parfois vidées de leurs sièges,
ordinateurs, etc. On laissait toujours des obstacles derrière
nous. On remontait toujours à plus de 2000 (dont au moins
400 personnes des BB) vers le nord. D'une rue latérale
assez large, sur la gauche, de l'ouest, sont arrivés deux
camions blindés des carabiniers (en provenance de la caserne
qui avait été lapidée ?). Ils sont arrivés
à fond et ont pris position, côte à côte,
à une trentaine de mètres de la manif. Ils sont
tombés sur la queue de manif, là où les gens
du BB se trouvaient. Les gens ont commencé à courir,
surtout les derniers de la manif, car ils avaient peur d'être
séparé du gros du cortège. Les flics ont
tiré quelques lacrymos. Je sais pas vraiment ce qu'ils
foutaient là les flics, mais c'était pas prudent
parce que les gens ont assez vite compris que, dans les deux camions,
il devait y avoir 30 flics au maximum et que nous, on était
des centaines. Alors, il y a au moins 60 personnes qui ont chargé
les camions en leur lançant plein de pierres et de bouteilles
vides. Les flics restaient dans les camions. Il y avait juste
un flic par camion qui ont tiré deux ou trois lacrymos
à partir d'une ouverture sur le toit mais, comme ils ont
pris des pierres dans la gueule, ils sont vite rentrés
complètement à l'intérieur.
Les gens ont continué à charger et ont commencé
à entourer les deux camions et à taper dessus avec
des barres de fer, des manches, etc. Bizarrement, les deux camions
ont pas bougé. Celui de gauche à fini par reculer
à fond de 30 mètres mais pas celui de droite. Leurs
vitres spéciales étaient toutes fendues mais elles
tenaient. Des gens ont eu l'idée de vérifier si
les portes avant du camion étaient fermées. Manque
de pot pour les flics, elles l'étaient pas. Elles se sont
ouvertes !!! Le flic à côté du chauffeur a
réussi à refermer la sienne très vite mais
pas le chauffeur, qui a à moitié été
extrait du véhicule, a été rattrapé,
in extremis, par l'autre flic mais a quand même eu le temps
de se faire démonter la tête. Ça craignait
pour les flics. A ce moment-là, il y a eu plusieurs détonations.
Ça venait du deuxième camion qui avait reculé.
J'ai vu le chauffeur de ce camion dehors près de sa portière.
Des gens m'ont dit après que ça devait être
des tirs de balles en plastique, mais j'ai pas vu le flic tenir
de carabine. Peut-être que j'ai mal vu ? Peut-être
que le flic a sorti son arme de service et tiré ? En l'air
? Je sais pas ce qui s'est passé exactement, mais il y
a eu au moins deux ou trois détonations d'arme à
feu. Toujours est-il que les gens ont un peu reculé, que
le chauffeur du premier camion (en sang) a pu refermer sa portière
et faire reculer le camion malgré son pneu arrière
droit crevé à coups de couteau. La manif est repartie,
toujours vers le nord. Les gens étaient remontés.
Quelques banques ont encore été attaquées
et cette fois-ci les gens du BB n'étaient plus seuls à
le faire... La vitrine d'un magasin LIDL a été défoncée
et des gens ont pris de la boisson (il faisait chaud), de l'eau
(pour les lacrymos) et des liquides inflammables (ça peut
toujours servir) dedans. J'ai pas vu l'intérieur, mais
je pense pas qu'il ait été dévasté
(trop peu de gens, trop peu de temps à l'intérieur).
D'ailleurs, dans ce cortège, c'est surtout les banques
qui ont été attaquées. Une voiture de haut
de gamme a eu deux ou trois vitres cassées. La petite enseigne
Coca-Cola d'un petit bar a aussi été cassée.
Avant de renverser les containers sur la route, les gens poussaient
précautionneusement les scooters qui étaient garés
à côté pour pas qu'ils soient abîmés.
Un début de feu de container à papier a finalement
été éteint parce qu'il risquait d'abîmer
un arbre et de noircir une façade d'immeuble. C'était
pas la grande dévastation dans ce cortège. C'était
ciblé et très bien comme ça. On a encore
marché vers le nord. On était pas loin du stade
Carlini. On s'est retrouvé dans des petites rues. Le parking
d'une société de vigiles a été attaqué
et quelques voitures pour les patrouilles de gardiennage ont été
brûlées. Ensuite, on a obliqué vers l'ouest,
toujours dans des petites rues, car les responsables du SO des
Cobas en avaient, je cite, "marre de la périphérie".
Ils avaient envie de se rapprocher du centre et de la zone rouge.
Le cortège s'étirait et les gens étaient
assez crevés (plusieurs heures de marche, le soleil, les
incidents, le stress
). A ce moment-là, des camions
de la police ont déboulé assez vite derrière
nous, les flics sont descendus à fond et ont chargé
direct en courant vite, suivi de très près par leurs
camions. Les rues étaient étroites et il n'y avaient
pas de grosses poubelles ni de containers à cet endroit.
Les flics nous ont collé au train de manière agressive
pendant pas loin de 200 mètres en s'arrêtant juste
de temps en temps pour reformer correctement leur ligne. Ça
a été chaud pour les gens qui étaient en
queue de manif. On a débouché dans une rue où
il y avait des poubelles et des containers et on les a mis sur
la chaussée. On était serrés et on a pas
traîné. Les flics ont lâché l'affaire.
On a fini par déboucher sur le haut d'une grande avenue
qui descend vers la gare de Brignole, dans le centre, et qui longe
de nombreuses voies de chemin de fer (qui se trouvent nettement
en contrebas par rapport à l'avenue en question). A l'endroit
où on est arrivés, cette longue avenue doit s'appeler
corso Gastaldi. Là, les gens étaient vraiment crevés.
On apercevait le centre-ville, du côté de la "zone
rouge", avec un immense nuage jaunâtre de lacrymo qui
flottait au-dessus. On est descendus un peu vers le centre et
on est arrivés au cul d'une grande manif qui était,
à l'origine, celle des Tute bianche, des jeunes cocos italiens,
du comité grec, des Basques, etc. Il devait y avoir au
moins une quinzaine de milliers de personnes à vue de nez.
A la queue de ce cortège, il y avait la LCR (200-300 ?)
et un groupe un peu plus nombreux de cocos italien. Ces deux groupes
ont fait la chaîne pour empêcher une partie de notre
cortège de descendre vers les affrontements en bas de la
grande avenue. Des gens du BB ont pété une banque
(la pauvre !) et les cocos sont devenus furieux et agressifs.
Tout ça a provoqué des bousculades entre les cocos
d'un côté et des gens des Cobas, de DG et du BB de
l'autre côté. La LCR a pas bougé une oreille
et s'est tenue à l'écart. Finalement, ça
s'est un peu calmé et par petits groupes, sur les trottoirs,
une partie de la manif est allée, en ordre très
dispersé, et peu à peu, assez lentement, rejoindre
la zone d'affrontement, qui était assez loin. J'ai l'impression
que la majorité du cortège avec lequel j'avais manifesté
est resté au cul de la manif, fatiguée et trop éloignée
pour comprendre que les heurts se poursuivaient de manière
intense loin devant, à près d'un kilomètre,
je crois. Je pense vraiment pas qu'on ait été très
nombreux de ce cortège à aller jusqu'au cur
de la zone d'affrontement, là où le corso Gastaldi
se rétrécit et devient la via Tolemaide. A peu près
au milieu de la descente, il y avait le camion des Tute bianche
avec sa grande plate-forme, à plusieurs centaines de mètres
de la zone d'affrontement. Il y avait fréquemment des ambulances
qui passaient en descendant et en remontant pour aller chercher
les blessés. Comme il y avait pas mal d'ambulances, il
était clair qu'il y avait pas mal de blessés.
Il y avait des milliers de personnes dans cette zone proche des
affrontements qui se reposaient, observaient, s'aéraient
après avoir reçu des gaz lacrymo plus bas. J'ai
continué à descendre vers la via Tolemaide. Il y
avait toujours plein de gens et les premières traces d'affrontements
commençaient à apparaître : pierres par terre,
débris de bouteilles qui avaient été lancées,
grosses poubelles et containers au milieu de la route, une voiture
retournée et calcinée, petites rues latérales
obstruées tant bien que mal pour gêner l'approche
de la police, atmosphère de plus en plus chargée
en gaz lacrymo... Il y avait vraiment beaucoup de gens qui portaient
des équipements ou des éléments d'équipement
"à la mode Tute bianche" : casques divers, épaulettes
de mousse, protections sur les avant-bras, cuirasses de mousse,
boucliers en plexiglas, masques antigaz, lunettes de protection...
Il y en avait des centaines... et des centaines d'autres sans
équipements particuliers si ce n'est des masques divers
pour se protéger des gaz. En fait, après avoir tenté
à plusieurs reprises de passer "pacifiquement"
dans la zone rouge en poussant avec leurs boucliers et leurs murs
de plexiglas montés sur roulettes les barrages de flics
, les Tute bianche (et les masses de gens qu'ils avaient agglomérés
derrière eux) ont commencé à basculer assez
massivement (et efficacement) dans des pratiques violentes. Ils
semblent n'avoir pas eu d'autres solutions face aux importantes
violences policières qu'ils subissaient.
J'ai continué à descendre. Il y avait toujours plein
de gens. L'avenue se rétrécissait. Il y avait plein
de gaz et des centaines de pierres par terre. Des gens remontaient
s'aérer après avoir été gazés,
d'autres redescendaient se battre après s'être aérés.
Il y avait en fait un roulement des émeutiers qui fait
que leur nombre, leur "fraîcheur" et leur combativité
ne diminuaient pas. Des petites équipes de gens s'occupaient
de donner des soins : pansements et désinfectant pour les
petites coupures, eau pour rincer la bouche et les yeux... Il
y avait de plus en plus d'obstacles au milieu de la rue, quelques
voitures calcinées et des débuts de barricades.
Des petits groupes de gens redescendaient vers le lieu d'affrontement
en traînant des containers, des grosses poubelles métalliques,
des grilles, des bastaings, des bouts de clôture en bois
qu'ils avaient été cherchés plus haut sur
l'avenue. On apercevait le dispositif policier plus bas avec les
cars derrière les cordons à une distance de 100-150
mètres. Les flics n'arrêtaient pas de gazer. Beaucoup
de leurs tirs étaient assez tendus : les projectiles arrivaient
dans les premières lignes d'émeutiers en rasant
les têtes. A mon avis, plus d'une personne a dû être
blessée en s'en prenant un dans la figure. Les gens relançaient
systématiquement les grenades vers les flics ou sur les
voies ferrés bien en contrebas. Il y avait des centaines
de personnes dans les premières lignes d'émeutiers.
Tous ces gens et les quelques milliers d'autres qui étaient
au-dessus, qui participaient régulièrement ou sporadiquement
au roulement des émeutiers ou les soutenaient en donnant
des soins, de l'eau, en apportant des éléments de
barricade, en surveillant les petites rues latérales ou
simplement en faisant masse derrière les premières
lignes (leur offrant ainsi un milieu de repli et d'appui et créant
également ainsi une densité humaine rendant impossible
le dégagement rapide de la zone par une série de
violentes charges policières) étaient très
déterminés. Les gens s'accrochaient avec les flics,
étaient gazés depuis des heures, mais c'était
très dur de les faire reculer et toujours ils réavançaient.
A ce moment-là, la volonté farouche de milliers
et de milliers de personnes était de pénétrer
dans la zone rouge par tous les moyens nécessaires
Peu de temps après que j'eus rejoint les premières
lignes d'émeutiers, une grosse contre-attaque des manifestants
a commencé à se déclencher. C'est comme si
les gens en avaient eu marre à ce moment-là. Des
centaines de gens ont commencé à ramasser tous les
projectiles possibles, à en bourrer leurs poches, à
traîner le plus près possible des flics le maximum
de poubelles, containers, objets encombrants pouvant servir à
construire une barricade. Des centaines de gens ont commencé
à avancer vers les flics. Les jets de projectiles sur les
rangs de la police se sont intensifiés peu à peu.
Ça a commencé à être une véritable
pluie de pierres. Ils y en avait toujours plus qui leur tombaient
dessus. Les gens continuaient à approcher. On était
à 20 mètres des flics. Leurs rangs ont commencé
à s'agiter. Ça devenait très dur pour eux
de tenir leur ligne. Ils en prenaient plein la gueule et ils voyaient
tous que derrière les centaines de gens qui les attaquaient,
il y en avait mille, deux mille, plus haut sur l'avenue, qui commençaient
à suivre, de plus en plus massivement et rapidement, les
premières lignes émeutières, droit sur eux.
Les gens criaient "Avanti ! Avanti !". Alors, les rangs
des flics ont commencé à se disloquer. Les derniers
rangs ont commencé à tourner les talons dans la
confusion, immédiatement suivis par les rangs intermédiaires
puis par les premiers rangs avec les boucliers. Les gens ont tous
chargé en criant et en lançant tout ce qu'ils pouvaient.
Les flics ont dépassé leurs véhicules (cars
et estafettes) qui auparavant se trouvaient en position assez
rapprochée derrière eux. Les cars essayaient de
reculer en marche arrière au milieu des flics qui couraient
à fond. J'ai l'impression que des véhicules se sont
rentrés dedans ou se sont mutuellement bloqués.
Certains ont été lapidés. Ils arrivaient
à reculer mais trop lentement. Les gens se précipitaient
sur tous les projectiles qui traînaient par terre. Tous
les 20 mètres, ce qui avait été lancé
sur les flics était récupéré et réutilisé
immédiatement. Le caillassage a pris la forme d'un roulement
intensif et rapide. Légèrement en arrière,
des dizaines de gens trimballaient en courant poubelles, containers,
grilles, etc. et déplaçaient ainsi la barricade
en même temps que la charge qui progressait par petits bonds
qui s'enchaînaient rapidement. L'ambiance était furieuse.
Le niveau de violence était vraiment élevé.
Du fond de ce qui restait du dispositif policier, ça a
commencé à grenader furieusement. Ça nous
a ralenti. Les véhicules ont réussi à se
dégager. Les flics ont commencé à reconstituer
leurs lignes. On les avait fait reculer de 200 mètres je
pense. Ils avaient dû mettre beaucoup de temps à
les gagner ces 200 mètres. On les leur a fait perdre en
dix minutes. Les gens ont commencé à essayer de
réunir les éléments nécessaires à
une nouvelles attaque (ramener et stocker des projectiles, des
éléments de barricades mobiles, se regrouper à
beaucoup derrière les premières lignes
). Les
flics venaient de se prendre une bonne claque et ils étaient
déstabilisés, sur la défensive. C'est pour
ça qu'ils ont dû envoyer ces 30 ou 40 flics dans
la petite rue latérale, sur la gauche des premières
lignes de manifestants. Ils devaient penser que les premiers rangs
allaient avoir peur d'une charge sur le flanc qui les auraient
coupés du reste de la manif (charge qui aurait immédiatement
été suivie d'une autre de face) et qu'ils allaient
reculer légèrement permettant ainsi de réduire
la pression sur le dispositif policier de la via Tolemaide ou
peut-être qu'ils cherchaient à nous dissuader de
nous répandre dans les petites rues sur la gauche et d'étendre
ainsi le périmètre des combats. Je sais pas pourquoi
ils ont fait ça mais, en tout cas, c'était pas une
bonne idée parce qu'il y avait plein de gens énervés
qui arrivaient pour appuyer les premières lignes et occuper
l'espace gagné pendant la charge des manifestants et les
quelques dizaines de flics ont très vite été
chargés par au moins 60-70 personnes. Les flics ont reculé
vers une petite rue perpendiculaire. On a continué à
les charger. Plus ils reculaient, plus on chargeait. On les a
poursuivis dans la petite rue perpendiculaire. On s'est retrouvés
en sortant de la petite rue sur une petite place avec une église.
Les flics ont continué à reculer sous les projectiles.
Pas mal de manifestants avaient des barres de fer ou des manches
de pioche. On était plus nombreux qu'eux et ils fuyaient
le contact. Les flics sont allés reconstituer leur ligne
à l'entrée d'une rue qui donnait sur la place. En
se repliant, ils ont laissé à 20-30 mètres
derrière eux, deux petites voitures 4 x 4 des carabiniers.
C'était violent, rapide et confus, alors je vais être
prudent. Les deux voitures ont essayé de reculer mais,
pour une raison que j'ignore, au moins la deuxième n'a
pas pu le faire. Le véhicule s'est alors retrouvé
coupé du reste du dispositif policier et au contact des
manifestants qui ont commencé à le lapider et à
frapper dessus avec des barres ou des manches. La vitre arrière
du véhicule a été brisée, j'ai pas
vu comment mais il n'y en avait plus. J'étais à
environ 10 mètres du véhicule, un peu en surplomb
par rapport à lui (qui était sur ma gauche) parce
que j'étais sur les marches de la petite église.
C'est à ce moment-là que j'ai entendu la première
détonation, assez forte, sèche et proche. Je me
suis instinctivement courbé et j'ai pensé que c'était
un coup de feu. J'ai regardé droit devant moi le dispositif
policier qui était à l'entrée de la petite
rue pour voir ce qui se passait, si c'était eux qui tiraient,
s'ils chargeaient. Il y avait des gaz, ils étaient à
30 mètres environ, je voyais pas grand-chose. Je crois
qu'il y a eu une autre détonation. J'ai pivoté sur
moi-même, toujours courbé, j'ai descendu deux ou
trois marches vers l'arrière, fait quelques pas et je me
suis accroupi derrière je ne sais plus trop quoi pour m'abriter.
Je me suis relevé un peu. Droit en face de moi, toujours
à environ 10 mètres à mon avis, il y avait
l'arrière du 4 x 4 des carabiniers avec sa vitre défoncée.
J'ai perçu des mouvements à l'intérieur.
Je me suis rabaissé et quasi immédiatement je me
suis un peu relevé et je crois (mais c'est un peu confus,
je ne peux pas être catégorique) avoir aperçu,
par la vitre arrière brisée, assez distinctement,
deux flics casqués, courbés ou accroupis, serrés
l'un contre l'autre. J'ai vu la "tache claire" d'une
main, hauteur de torse, avec dans le prolongement de cette main,
une masse noir et luisante. J'ai immédiatement compris
que ça ne pouvait être qu'une arme de poing et que
c'était de cette arme que provenait les détonations.
J'ai pensé qu'ils avaient tiré en l'air pour se
dégager. Les flics (parce qu'il me semble qu'ils étaient
deux) paraissaient agités et regardaient, en pivotant légèrement
sur eux-mêmes, par la fenêtre cassée si des
manifestants s'approchaient. Je ne voyais pas ce qui se passait
au sol. J'ai ensuite regardé derrière moi pour voir
ce qui se passait, si les manifestants avançaient ou reculaient.
Quand j'ai regardé devant moi de nouveau, la bagnole des
carabiniers était partie. Je me suis relevé. J'ai
avancé. Il y avait très peu de gens devant moi.
J'ai eu le sentiment que le bruit diminuait considérablement
pendant quelques secondes. Puis il y a eu quelques cris. Je me
suis dit qu'il y avait un problème, que quelque chose de
grave s'était produit. J'ai vu quelques personnes courir
et s'arrêter à 6-7 mètres de moi sur la gauche.
Je me suis approché. Il y avait 4-5 personnes en cercle.
Je les ai contournées. J'ai aperçu quelqu'un à
terre. Une lacrymo a roulé près de notre groupe.
J'ai shooté dedans pour la renvoyer vers les flics qui
bougeaient pas, toujours à 30 mètres environ. Je
me suis retourné pour regarder de nouveau le type à
terre. Ses pieds étaient près des miens. Je me souviens
de son tee-shirt blanc et de sa cagoule noire poisseuse et luisante
de sang. J'ai vu une flaque de sang qui s'élargissait à
partir de sa tête. J'ai remarqué qu'il pissait du
sang par l'orbite gauche. J'ai compris que c'était une
balle qui avait fait ça et que les coups de feu n'avaient
pas été tirés en l'air. J'ai fait quelques
pas en arrière en me tenant la tête. Quand je me
suis retourné, j'ai vu 2-3 journalistes avec caméras
et appareils photo qui zoomaient sur le type à terre. Les
flics ont commencé à approcher lentement. Un groupe
de 6-7 flics s'est détaché de leur rang et, derrière
3-4 boucliers, ils ont avancé droit sur nous assez lentement
et tranquillement à ce qu'il m'a semblé. Deux gars
ont commencé à soulever le type par terre. Je me
suis approché pour les aider mais un autre manifestant
s'est amené en disant que le type était gravement
blessé et qu'il ne fallait pas le bouger. Alors, les deux
gars l'ont reposé. Personne pensait qu'il était
déjà mort en fait. Le petit groupe de 6-7 flics
s'était encore rapproché. Ils étaient à
10 mètres peut-être. On a reculé et le rang
de flics qui suivait le petit groupe de tête à distance
s'est mis à charger, alors on s'est barrés à
fond. On savait pas quoi faire parce qu'on pensait que le type
à terre était salement touché mais pas mort.
On n'a pas vérifié si son cur ou son pouls
battait encore. Si on avait compris qu'il était déjà
mort, évidemment, on aurait jamais laissé son corps
entre les mains des flics et on l'aurait porté via Tolemaide
où on aurait chopé une ambulance (j'ose pas imaginer
l'effet que ça aurait produit sur les centaines et les
centaines de gens qui s'y trouvaient). Toujours est-il que les
flics ont chargé et la place s'est vidée, les derniers
manifestants ont rattrapé le gros du groupe et ont dit
qu'un type avait pris une balle et qu'il était peut-être
mort. Les gens ont poussé des cris de colère. Les
flics, après avoir vidé la place, se sont pointés
dans la petite rue par où les gens avaient commencé
à se tirer vers la via Tolemaide. Quand ils les ont vus
arriver, les gens leur ont foncé dessus en hurlant "Assessini"
et ont fait refluer les flics sur la petite place. En face de
moi, il y avait la rue où les gens chargeaient vers la
place et, sur ma droite, la rue qui débouchait sur la via
Tolemaide. J'ai aperçu au bout de cette rue, un blindé
léger qui remontait à fond la via Tolemaide en défonçant
tous les obstacles. J'espère que personne s'est trouvé
sur sa route parce que le blindé fonçait tout droit,
moteur à fond. J'ai croisé un des journalistes qui
avait assisté à la mort du manifestant, il parlait
français et m'a dit, à moi et à un autre
Français qui traînait là, qu'il fallait pas
se faire d'illusions : le type était mort. Il a dit qu'il
filait envoyer les images. J'ai rejoint la via Tolemaide par une
petite rue, plus haut que l'endroit où j'avais aperçu
le blindé passer. La nouvelle commençait à
se répandre dans les premières lignes émeutières
et les gens ont attaqué les flics furieusement. Moi, j'ai
commencé à remonter lentement en sens inverse. La
funeste nouvelle remontait le cortège, elle aussi. Je suis
tombé sur des gars des Tute bianche qui apprenaient la
chose. Ils m'ont montré des douilles, longues, de carabines
ou de fusils d'assaut, ramassées sur la via Tolemaide,
dans les secteurs autrefois occupés par les flics, en disant
que ça voulait dire qu'ici aussi les flics avaient tiré.
En fait, j'ai vu par la suite des images où les flics tirent
des grenades avec des fusils (et pas avec leurs étranges
lance-grenades compacts). Je pense que les douilles (à
blanc, qui sont uniquement destinées à propulser
la grenade) proviennent de tirs de grenades lacrymo effectués
au fusil. Ensuite, j'ai accéléré et crié,
pendant un bout de temps, tout en marchant vite, en plusieurs
langues, qu'il y avait un mort avec une balle dans la tête.
J'ai informé le SO de la LCR de la nouvelle. Puis, j'ai
continué encore quelque temps à remonter la manif
en annonçant la nouvelle. La tête de manif commençait
déjà remonter en direction du stade Carlini. Les
premières lignes émeutières étaient
enragées par la nouvelle et la majorité de la manif
était, quant à elle, écurée
par celle-ci et quittait les lieux.
QUELQUES
COMMENTAIRES PERSONNELS A PROPOS DU BLACK BLOC
Il regroupait, d'après moi, entre 800 et 1 000 personnes.
Le BB n'est pas l'expression du mouvement anarchiste. Il n'est
qu'une des expressions (parmi d'autres) de sa frange la plus radicale.
Il y avait vraisemblablement quelques milliers de militants et
sympathisants anars à Gênes. Le BB n'a regroupé
qu'une minorité du mouvement anar (et pas que des anars)
: un tiers ou un quart de celui-ci. De toute façon, le
BB n'a jamais prétendu représenter qui que ce soit.
Il s'est réuni pour agir de manière offensive. Il
l'a fait et pas trop mal fait dans l'ensemble. C'est tout.
A PROPOS DU BLACK
BLOC
Il regroupait, daprès moi, entre 800 et 1 000 personnes.
Le BB nest pas lexpression du mouvement anarchiste.
Il nest quune des expressions (parmi dautres)
de sa frange la plus radicale. Il y avait vraisemblablement quelques
milliers de militants et sympathisants anars à Gênes.
Le BB na regroupé quune minorité du
mouvement anar (et pas que des anars) : un tiers ou un quart de
celui-ci. De toute façon, le BB na jamais prétendu
représenter qui que ce soit. Il sest réuni
pour agir de manière offensive. Il la fait et pas
trop mal fait dans lensemble. Cest tout.
UN BLACK BLOC FRAGMENTE
Assez vite, suite aux premières charges policières
sur le corso Buenos Aires, le BB sest retrouvé fragmenté.
Je pense quà ce moment-là une partie de la
manif des Cobas et de DG plus une petite partie du BB sest
retrouvée dans la nature. Je pense ça parce que,
quand la manif sest retrouvée refoulée près
du forum du GSF, jai limpression quil y avait
un peu moins de monde dans le BB et le reste de la manif en général
(mais cest dur davoir une certitude). Si une partie
du BB sest effectivement retrouvée coupée
du reste, jignore complètement ce quils ont
pu faire par la suite.
Après quelques minutes dattente et dindécision
près du forum, 150 à 200 participant(e)s au BB ont
pris la tangente (aux environ de 13 heures ?) par un long escalier
assez raide vers un quartier qui surplombait le secteur. De ce
quils ont fait, je nai que quelques éléments
racontés par un compagnon qui sest retrouvé
dans ce cortège et dautres glanés dans la
presse. Il semble que ce groupe soit remonté vers le nord,
quil ait opéré du côté de la
place Tommaseo, du corso Buenos Aires, de la via Tolemaide puis
quil se soit déplacé vers la via Canevari,
quil ait attaqué ensuite la prison près de
la place Marassi puis obliqué vers louest jusquà
la place Manin, où leur présence au milieu, ou non
loin, de manifestants pacifistes a apparemment déclenché
des charges policières contre les non-violents. A ce moment-là
(milieu daprès midi), fatigué et un peu isolé,
il semble que ce groupe du BB se soit débarrassé
de son matériel et évaporé mais il est probable
que des éléments de ce groupe aient rejoint les
affrontements qui se développaient alors sur la via Tolemaide.
La majeure partie du BB (500, peut-être un peu plus) a suivi
le parcours que je décris dans mon témoignage. Il
semble également que des éléments BB isolés
aient été signalés dans la manif des CUB
(un autre sigle du syndicalisme de base italien, si je ne mabuse)
au nord-ouest et quils se soient livrés à
quelques dégradations mineures. Peu nombreux et refoulés
par le SO, leur action semble avoir eu peu dimpact (info
chopée dans la presse italienne). Plus surprenant, un article
du "Monde" du dimanche 22 et lundi 23, signé
par D. Rouard, fait état de la présence dun
groupe BB denviron 400 personnes, groupe actif dans le secteur
de la place Verdi et de la gare de Brignole et ce dès 10
h 30 et jusquà 15 heures. Ce secteur est proche du
lieu où le BB, dans sa très grande majorité,
sest rassemblé vers 12 heures en queue de manif Cobas-DG.
Ce groupe de 400, arrivé en avance, a peut-être cherché
à occuper son temps libre en attendant le rendez-vous de
12 heures. Peut-être que ce groupe nest pas allé
au rendez-vous ? Peut-être quil y est allé
mais quil est ensuite revenu après les premières
charges de la police (ce qui expliquerait quon ait été
moins nombreux dans le BB après avoir été
refoulé vers le forum) ? Ça nest pas clair.
POLICE ET BLACK BLOC
Oui, il y a eu quelques flics dans le BB, mais, des flics, il
y en a un peu partout et partout un peu. Même à ATTAC,
il y en a. Dans le BB, les flics ont rôdé un peu.
Pourquoi ? Pour faire leur boulot de flic : identifier les origines
nationales des composantes du BB, identifier des individus en
particulier, évaluer le nombre de groupes organisés
et expérimentés se déplaçant au milieu
des isolés et des inexpérimentés, étudier
de près les techniques émeutières, évaluer
le matériel offensif disponible (qualité, quantité
),
écouter les conversations ou essayer den susciter
pour recueillir des informations (objectifs, parcours, organisation
informelle, origine du matériel, lieux de stockage préalable
).
Cest tout. Le BB manipulé par la police ? Le BB nest
pas une création de la police (la preuve, cest que
la police et même les services secrets sont obligés
dessayer denquêter dessus). Le BB na pas
de chef, pas de troupes de petits soldats qui obéissent
à des ordres venus dun haut état-major secret,pas
dorganisation préalable, pas de cotisants, pas de
fichiers
Cest un rassemblement informel, ponctuel, un improbable
réseau mouvant, un conglomérat éphémère
de petits groupes affinitaires fermés et dindividus
isolés mais décidés à apporter leur
touche personnelle. Il y a potentiellement autant de BB que de
groupes et dindividus qui le composent.
Comment manipuler un bordel si collectivement et consciemment
entretenu ???
Ça, les journaleux stupides qui voient la main de la police
derrière le BB sont pas foutus de lexpliquer. La
police a laissé faire le BB et attaqué les non-violents
? Ce type daffirmation est martelée par ATTAC, les
Tute bianche, les pacifistes, etc. Jai suivi le BB et personnellement,
comme des centaines dautres, jai été
chargé par la police à bien des reprises. Cela relativise
déjà ce type daffirmation. Mais il est vrai
que, dans laprès-midi, les différents groupes
BB éparpillés ont apparemment connu une relative
tranquillité. Alors
Complaisance de la police ? Cest
peut-être beaucoup lui en demander. Moi, jai plutôt
limpression que la police, elle a été débordée
Il lui fallait tenir une vaste zone rouge : contrôler lintérieur
de cette zone mais surtout la limite de celle-ci pour empêcher
les manifestants dy pénétrer. Ça, ça
veut dire tenir de manière imposante un "front"
qui sétend sur des kilomètres, bloquer avec
des tas de flics des dizaines et des dizaines de rues. Des flics,
il y en avait plein mais ils nétaient pas tous sur
le terrain (et la logistique, lintendance, le renseignement,
le survol aérien, la garde statique des rues et bâtiments
de lintérieur de la zone rouge
ça occupe
plein de monde). Et en face, côté manifestants, combien
de gens ? Entre 60 000 et 80 000 ? En quatre cortège distincts
au départ, au nord, au sud, à lest de la zone
rouge et puis, le temps passant, ces cortèges, par choix
tactique ou suite à des charges, ils se sont répandus,
étalés. Il y avait des cortèges immobiles,
des cortèges mobiles (voire très mobiles), des groupes
isolés. Comment intervenir à un endroit si une bonne
partie des routes qui y mènent sont pleines de manifestants
? Le temps dy envoyer 100 ou 200 flics, est-ce que le cortège
visé sera encore là ? Ou bien est-ce quil
sera déjà parti ailleurs, à 1 ou 2 kilomètres
de distance ? Sera-t-il possible alors de le suivre, de le rattraper
? Par quelles rues, car il y a plein de manifestants en mouvement
qui peuvent bloquer celles-ci ? Pas facile à gérer
tout ça... De plus, le 20 juillet, lessentiel pour
la police, cétait de ne pas perdre la face, déviter
au maximum les incursions dans la zone rouge et surtout éviter
quune partie, même minime, de cette zone ne reste,
même peu de temps, aux mains des manifestants. Pour elle,
jai limpression que, sur cet aspect-là des
choses, elle mettait en jeu son honneur. Jai limpression
quils ont blindé leur dispositif statique, partout
(on ne sait jamais...) et que ça leur a immobilisé
la majeure partie de leurs forces opérationnelles. Jai
limpression que leurs forces mobiles dintervention
nétait finalement pas si importantes, surtout face
à tant de gens, dans tant dendroits à la fois.
A mon avis, ça explique que les groupes BB aient parfois
été laissés tranquilles. Les groupes BB ont
opéré de manière assez mobile et rapide et,
pour lessentiel et la plupart du temps, assez loin de la
zone rouge. A ce moment-là, dans le courant de laprès-midi,
loin de la zone rouge, je pense que les deux groupes BB les plus
importants nétaient pas, à mon avis, lobjectif
prioritaire, le danger le plus pressant pour la police, qui avait
bien dautres chats à fouetter, entre autres avec
les Tute bianche qui semblaient bien linquiéter,
vu leur nombre, leurs équipements, leur expérience
et leur capacité à entraîner les gens derrière
eux. Cest dailleurs pour toutes ces raisons que les
Tute bianche ont été attaqués durement par
la police et pas parce que quelques groupes BB isolés traînaient
dans le secteur. Les Tute bianche ont été attaqués
parce quils étaient considérés comme
dangereux pour la zone rouge. Au lieu de mettre ces attaques policières
sur le dos de quelques petits groupes BB, ils devraient les assumer
et en être fiers. Ils ont effrayé la police (peut-être
même plus que le BB, même si cest dune
manière différente), cest pour ça,
je pense, quelle les a attaqués si durement
CONSEIL PERSONNEL
AUX PACIFISTES
Gentils et gentilles pacifistes, jai bien peur que les méchantes
filles et les mauvais garçons du black bloc ne soient guère
chevaleresques. Ils se livrent à des activités mobiles
et risquées. La bienséance nest pas leur fort.
Ils ne peuvent pas et ne doivent pas sencombrer avec. Alors,
si en plein sit-in devant les flics, vous les voyez débouler,
un conseil bienveillant (cest sincère, je vous respecte
même si je ne partage pas forcément vos options politiques
et pratiques), ne restez pas figés sur place, regroupez-vous,
éloignez-vous hors de portée des charges et des
tirs de lacrymos de la police, attendez que ça se tasse
et, une fois que les gens du BB auront filé, reprenez le
cours de vos activités.
LE BLACK BLOC ET
"LA CASSE"
Sacro-sainte propriété privée !!! Que de
larmes de crocodiles versées sur les vitrines de banques
Et les voitures, vous avez vu ce quils ont fait avec les
voitures !!! Le fétichisme de la marchandise a encore de
beaux jours devant lui. Tout ce qui représentait le grand
capital, la société marchande, les multinationales
et le contrôle social et policier a été attaqué
: banques, distributeurs de billets, agences immobilières,
concessionnaires des grandes firmes automobiles, caméra
de vidéosurveillance, voitures de patrouille dune
société de gardiennage, véhicules de police,
caserne de carabiniers et prison. Le mobilier urbain a été
utilisé (containers et poubelles) systématiquement
à des fins de protection (barricades) et dentrave
à la circulation des véhicules de police. Deux supérettes
ont été partiellement pillées à des
fins de ravitaillement en boissons (bières essentiellement),
eau pour les lacrymos, produits inflammables
un magasin
daccessoires de moto pour des casques, des chaînes
et de gros blousons de cuir, toutes choses pouvant servir durant
les affrontements. La plupart des véhicules personnels
détruits lont été par le groupe de
150-200 qui est parti par les escaliers près du forum.
Je trouve ça assez inutile, mais je me pose la question
de savoir dans quelle mesure le fait dêtre peu nombreux
et spatialement isolé du gros morceau des BB ne les a pas
incités à incendier les voitures. La crainte dune
intervention policière éclair les a peut-être
poussés à bloquer les rues le long de leur trajectoire
avec des voitures incendiées qui sont des obstacles bien
plus efficaces que quelques légers containers renversés.
Mais peut-être quils avaient tout simplement envie
de tout foutre en lair
Il semble aussi que ce groupe
sen soit pris à des vitrines de petits commerce.
On peut aussi regretter la destruction de certains feux de signalisation
et de quelques cabines téléphoniques. Il y a peut-être
aussi derrières ces comportement lidée de
"faire grimper laddition financière du G8".Tout
ça peut être considéré comme regrettable
ou inévitable, mais ça ne va pas empêcher
la terre de tourner et Gênes ne ressemblait pas à
Stalingrad le soir du 21, même sil y avait des secteurs
abîmés. Il ne sagit jamais que de quelques
dizaines de vitrines, véhicules, poubelles
On condamne
les "casseurs extrémistes" mais on est pas près
de voir les 8 salopards du G8 devant un tribunal pour avoir cassé
lexistence de centaines de millions de personnes condamnées
à la pauvreté, lignorance, lexploitation,
labsence de soins, la répression, lexil
La "refondation sociale" sauce MEDEF se porte bien en
France ? Combien Bush a-t-il fait exécuté de gens
? La précarité, la flexibilité sépanouissent-elles
toujours aussi bien dans lAngleterre de Tony Blair ? Que
fait larmée de Poutine en Tchétchénie
? Deux poids, deux mesures. Rien de nouveau sous le soleil !
"LA VIOLENCE,
CEST PAS BIEN !"
Assez dhypocrisie. Qui a cru que ça pouvait bien
(ou même pas trop mal) se passer à Gênes ???
Huit salopards, accros au capitalisme, qui règnent sur
le monde se réunissent entourés dune armée
de flics italiens (dont la réputation nest plus à
faire), des centaines dorganisations diverses appellent
des dizaines et des dizaines de milliers de gens à essayer
de pénétrer dans le périmètre interdit
le 20 juillet, après Göteborg, où la police
a déjà tiré, en Italie où les traditions
de luttes sociales sont pas spécialement marquée
par la pensée de Gandhi
Qui peut bien être
étonné par ce qui sest passé ??? Qui
joue les étonnés et pourquoi ??? Je nai rien
contre les pacifistes mais, SVP, pas de leçons de morale
judéo-chrétienne à 2 francs. La violence
et la répression sont, malheureusement, très souvent
une dimension incontournable des mouvements sociaux de résistance
au capitalisme. Il ny a guère que dans la gauche
occidentale et depuis peu (vingt ans environ) quon semble
lavoir oublié à ce point. Des morts, il y
en aura dautres. Les Etats et le capital ne feront pas de
cadeaux. La résistance, comme beaucoup de choses, a un
prix. Vous êtes priés datterrir. Quand à
labominable black bloc qui dérange tant de monde,
il était là à Seattle, à Washington,
à Davos, à Prague, à Göteborg, à
Gênes (sans compter Nice où il y a eu des violences...
mais pas de black bloc !!! Allez y comprendre quelque chose...)
et il resurgira là où il faudra quand il le faudra.
Depuis le début, le BB fait ce quil pense avoir à
faire, unilatéralement, sans soccuper de ce quen
pense "la gauche respectable et responsable" (en politiquement
correct dans le texte). Il na jamais demandé dagrément
à qui que ce soit et ne le fera jamais. Il ne cherche pas
à plaire. Comme le disait un gars du BB : "Si on attend
que les sociaux-démocrates viennent nous inviter, on va
pouvoir attendre chez nous très, très, très,
très longtemps
alors, soyons autonomes, faisons notre
truc !". Renvoyer dos à dos la violence de la police
et celle du BB, cest comme renvoyer dos à dos celle
des jeunes Palestiniens qui lancent des pierres et celle de larmée
israélienne qui les abat au fusil dassaut. Cest
honteux mais plus dun journaliste, plus dun "leader"
politique, associatif, syndical le fait. Certains vont même
jusquà se demander pourquoi la police na rien
fait de manière préventive contre le BB (Cassen
entre autres). Ça veut dire quoi M. Cassen dATTAC
??? Il faut aller au bout de ce que sous-entend de manière
puante votre déclaration !!! Allons, du courage !!! Réclamez
les arrestations préventives sur la base du "délit
dopinion radicales"
UNE REALITE QUI DERANGE
Tous (gouvernements, associations, partis et syndicats "responsables")
cherchent à dissimuler un aspect dérangeant des
événements de Gênes et pratiquent en conséquence
une certaine désinformation avec la complicité objective
des médias. Tous rendent le black bloc responsable des
violences et de la casse commises côté manifestants.
Il a bon dos le BB. Comme cest simple ! Trop simple ! Simpliste
même ! Le BB sert de bouc émissaire. Il sert à
occulter un fait précis. Le vendredi 20 juillet 2001, la
violence a assez largement dépassé laction
du BB. Daprès ce que jai pu voir, ce sont des
milliers de personnes qui ont participé (ou soutenu) activement
ou passivement, régulièrement ou sporadiquement,
systématiquement ou occasionnellement aux affrontements.
Il y avait de tout parmi ces gens : du BB bien sûr, mais
aussi pas mal de syndicalistes de base des Cobas (mais ça,
les leaders des Cobas ne lassument pas), des jeunes de Diritti
Globali, des groupes marxistes-léninistes qui ne faisaient
pas partie du BB, des tas de Tute bianche (ça, les leaders
des Tute bianche ne lassument pas non plus) et des centaines
et des centaines de jeunes inorganisés... La casse est
essentiellement le fait du BB, mais aussi, de façon secondaire,
le fait de petits groupes marxistes-léninistes et de gens
des Cobas et de DG (qui ont participé à lattaque
de plus dune banque
). Les Tute bianche sen sont
pris à quelques voitures via Tolemaide, poussés
par la nécessité de monter des ébauches de
barricades. Ils ont copieusement utilisé aussi le mobilier
urbain. Les affrontements les plus acharnés (ainsi que
la mort du jeune manifestant) ont eu lieu, du milieu à
la fin de laprès-midi, dans le secteur de la via
Tolemaide. Dans ce secteur, les centaines et les centaines démeutiers
des premières lignes et les centaines et centaines dautres
qui saéraient et se reposaient un peu plus loin (au
milieu de tas de gens qui, sans participer à lémeute,
la soutenait en étant présent physiquement, à
proximité) étaient majoritairement des Tute bianche
et des inorganisés qui avaient suivi leur cortège.
Ça sautait aux yeux, car les émeutiers portaient
essentiellement des protections "à la mode Tute bianche".
Il y avait pas mal de petits groupes du BB et aussi quelques-uns
des Cobas mais minoritaires. Ça aussi, ça se voyait,
car les gens du BB et des Cobas avaient eux aussi un certain "style"
déquipement et, le moins quon puisse dire,
cest que les Tute bianche qui se battaient étaient
loin dêtre à la traîne. On peut même
dire quils étaient enragés. De toute façon,
pour des masses de gens, le vendredi 20 était le jour (attendu
avec une grande détermination), de "lattaque
de la zone rouge". Cest comme ça, sans fioritures,
que parlaient des tas de gens. Il sagissait dattaquer
!!! Spontanément, des tas de gens avaient une vision offensive
de cette journée. Si tant de gens ont suivi les Tute bianche,
cest parce quils proposaient concrètement denfoncer
les lignes policières. Cet aspect des événements
est extrêmement dérangeant :
Pour les gouvernements du G8, car cela signifie que, entre
eux et une partie minoritaire, mais pas négligeable, du
mouvement antimondialisation, ce nest plus un fossé
qui existe mais un gouffre ! Et ils savent quils ne pourront
pas le combler. Ils savent que des masses de gens nattendent
plus rien deux et commencent à penser, agir et sorganiser
(même si cest confusément) en dehors des règles
du système. Que tant de gens, ce jour-là, aient
concrètement et radicalement dépassé la peur
de la police et défié, renié leur autorité,
leur légitimité, leur puissance, leur "drôle
de paix" si terrible et si juteuse, voilà quelque
chose quils ne peuvent pas assumer politiquement, symboliquement,
médiatiquement. Gênes a été une flambée
de révolte qui couvait depuis longtemps, la manifestation
dune renaissance diffuse de formes de conflictualité
inintégrables, indigérables en létat
actuel des choses. Les troubles doivent donc impérativement
être mis sur le dos dextrémistes ultraminoritaires
complètement isolés du reste du mouvement, mouvement
avec lequel les Etats du G8 se prétendent prêt au
dialogue "responsable et démocratique", voire,
sil le faut, à négocier des miettes et des
aménagements de façade.
Pour les associations, partis et syndicats qui se veulent
"responsables et représentatifs", car cela signifie
quils ne contrôlent pas, ou plus, ou pas assez leurs
"troupes" durant les énormes manifestations quils
organisent. Pire, ce qui sest passé à Gênes,
donne à penser quune minorité des gens qui
viennent dans ces manifs (en particulier des fractions assez importantes
de la jeunesse) se fout bien de leurs consignes et de leurs savants
calculs stratégiques et ça, quelque part, cela remet
en cause leur représentativité ainsi que leur caractère
responsable, car est-il bien responsable dappeler à
dimmenses manifs, à pénétrer dans la
zone rouge alors quon est incapable de contrôler la
situation ??? Associations, partis, syndicats traditionnels, eux
aussi ont été débordés. Or, on ne
peut pas apparaître, être reconnu comme un interlocuteur
valable, crédible, sérieux, responsable aux yeux
des maîtres du monde (et se voir ainsi aménager réglementairement
une petite place au sein des grandes institutions politiques et
financières internationales) si on est incapable de tenir
sa "base", sil apparaît même quune
partie de celle-ci ne tient pas compte du "sommet" et
quelle va jusquà remettre spontanément
et concrètement en question la validité des choix
politiques et pratiques effectués par celui-ci. Doù
les éructations dAgnoletto, des dirigeants des Tute
bianche, de José Bové, Susan George et consorts
contre le black bloc. Là encore, les événements
de Gênes doivent impérativement être mis sur
le dos du black bloc. Tous deux débordés, pouvoir
et coalition antimondialisation "officielle" cherchent
à sauver les apparences grâce au black bloc, le pouvoir
parce quil a été durement contesté
et la coalition parce quelle veut être représentée
et intégrée (avant dêtre digérée)
dans les institutions et pour cela, elle doit donner des gages
de "respectabilité" (montrer que, même
si elle conteste certains aspects du monde, elle ne veut pas le
changer vraiment, montrer que, sous un remaniement de certaines
formes, cest bien le même monde quelle veut).
Ce que veut la coalition (ou, en tout cas, une grande partie de
celle-ci), cest que le paritarisme soit étendu du
domaine des relations sociales nationales à celui des relations
sociales et environnementales internationales. Cest ça
la logique profonde dune bonne partie de la coalition.
Les événements de Gênes ont eu le mérite
de pousser les grandes puissances dans leur retranchement au sens
propre comme au sens figuré. Au sens propre, car ils ont
tenu leur sommet dans un camp retranché, entouré
dune armée de flics, ce qui ne les a pas empêchés
dêtre symboliquement assiégés et attaqués.
Au sens figuré, car leur image a été fortement
dégradée (quoi quils en disent) et parce quon
les a mis sur la défensive politiquement.
En ce quils ont été très dérangeants,
les événement de Gênes (et les efforts pour
les déformer et les occulter) ont également limmense
mérite de faire remonter au grand jour, en pleine lumière,
les logiques souterraines convergentes qui animent le pouvoir
en quête dinterlocuteurs, dune part, et sa "contestation
responsable" en quête de reconnaissance institutionnelle,
dautre part.
CE TEXTE EST MODESTEMENT DEDIE A LA MEMOIRE DE CARLO GIULIANI
ABATTU PAR UN CON DE FLIC MORT DE TROUILLE. SALUT AUX GENS QUI
SE SONT BATTUS DANS LES RUES DE GENES ET A CELLES ET CEUX QUI
LES ONT SOUTENUS !!!
LA RESISTANCE CONTRE
LE CAPITAL ET LES ETATS NA PAS COMMENCE A SEATTLE ET ELLE
NE SARRETERA PAS A GENES.
Un anarchiste, quelque part en France, fin juillet 2001
Texte publié sur a-infos le 6 août 2001
[Paru dans Cette Semaine n°83, sept/oct 2001, pp. 25-31]