Nous comparaissons encore une fois face à ce tribunal à cause de notre participation à la manifestation contre les biotechnologies du 7 octobre 2000, organisé par le groupe écologiste Il Silvestre. Cette manifestation faisait partie de deux jours de lutte contre toute forme de manipulation génétique et avait pour objectif d'informer sur les dangers et les projets réels qui se trouvent derrière le monde des biotechnologies.

Les conséquences d'une logique de domination qui voit tous les êtres vivants comme des ressources à gérer afin d'obtenir un profit maximum sont toujours plus évidentes et visibles. On nous a toujours dit que les problèmes de la faim dans le monde sont dûs à un manque de ressources naturelles alors qu'ils ont exclusivement pour origine le pillage perpétré depuis des années au détriment du Sud du monde par les gouvernements et les multinationales des grandes démocraties occidentales.

Ceux qui depuis toujours ont pilé les richesses naturelles, affamant des populations entières, sont les mêmes qui proposent aujourd'hui la diffusion des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) comme la solution inévitable. Ils avaient déjà fait ainsi dans les années 70 avec le projet de "Révolution Verte" de la FAO, en voulant légitimer la diffusion de nouveaux poisons chimiques, de plantes stériles et peu nutritives qui rendent les populations plus dépendantes des multinationales productrices, derrière une façade de solidarité. Mais c'est surtout à travers le racket des brevets qu'une poignée de multinationales sont devenues toujours plus les maîtres de plantes depuis toujours vivrières, jusqu'au monopole complet. De ce monopole découle nécessairement une forte réduction de la biodiversité sur la planète (il suffit de penser à la présence de dizaines et dizaines de variétés de riz rien qu'en Inde, par rapport au nombre infinitésimal qui sont cultivées dans les énormes monocultures occidentales). Le fait qu'un nombre réduit d'entreprises vouées au profit possèdent la diversité génétique et contrôlent l'alimentation mondiale les place dans une position de pouvoir énorme.

Et comme si cela ne suffisait pas, la dangerosité des OGM est déjà établie : ils sont responsables de nouvelles intolérances alimentaires, de la création de nouvelles souches d'insectes résistants aux poisons en faisant disparaître les autres, et d'augmentation de l'uniformité génétique.

L'attaque contre le vivant ne se limite évidemment pas au monde agricole. L'ingénierie génétique a allongé ses tentacules sur les êtres humains et sur les autres animaux avec les projets de xénogreffes, de clonage et de modification génétique, pour donner vie à une nouvelle "ère" déjà imaginée par les nazis à l'époque : celle de l'eugénisme, un monde vivant complètement transformé qui n'a plus rien d'identique au monde naturel que nous connaissons. Des êtres vivants nouveaux en fonction des intérêts d'une science au service des grandes multinationales de la chimie, pharmaceutiques et agroalimentaires.

Les deux journées de lutte contre les biotechnologies qui se sont tenues à Florence voulaient porter l'attention sur ces problèmes ; les individus présents aux mobilisations ont exprimé leur propre contenu, ont voulu affirmer un refus clair à cet "existant" nouveau que les tyrans au pouvoir sont entrain de construire. De tels contenus ont été définis comme trop radicaux par le procureur qui nous mène aujourd'hui ici dans ce tribunal. Face à une destruction systématique de la nature, à la réduction des êtres vivants en machines, aux projets de contrôle totalitaire et à l'appauvrissement des conditions humaines, nous ne pouvons que porter une critique et une résistance radicales qui doit réunir les exploités du Sud et ceux des métropoles occidentales. Tels furent les contenus de la manifestation du 7 octobre 2000, qui n'a même pas réussie à démarrer, bien qu'elle ait été autorisée. La violente charge des flics est partie sans avertissement et les manifestants n'ont eu d'autre choix que celui de se défendre d'une attaque préméditée.
A présent nous réaffirmons une fois encore les contenus qui nous ont amenés dans la rue ainsi que la volonté de continuer à le faire, en dénonçant la nocivité des organismes génétiquement modifiés, de la recherche biotechnologique, des xénogreffes, du clonage de tout être vivant.

Florence, le 19 mars 2003
Quelques inculpés