Lettre de David Santini, depuis la prison Le Vallette (Turin)

 

La lettre suivante de David, envoyée le 26 octobre, n'est par-venue que le 5 novembre 2004 à quelques compagnons qui résident autour de Turin.

26 octobre 2004, Le Vallette

A tou/tes les compagnon/nes du mouvement anarchiste et antiautoritaire, aux hommes et aux femmes de cœur,

Je m'appelle David Santini, je suis un individu anarchiste séquestré dans le lager Le Vallette, où la censure, l'isolement et les perquisitions conti-nuent inexorablement. Je suis accusé de faire partie d'une association subversive qui a opéré sous divers sigles à l'enseigne de la dénommée Federazione Anarchica Informale [Fédération Anarchiste Informelle]. Je revendique mon identité d'anarchiste, mais je conteste et repousse de telles accusations.

Je ne fais et n'ai jamais fait partie d'aucune association, mais j'exprime ma pleine solidarité avec ceux qui " dénoncent " les injustices énormes dont notre société est malheureusement victime. Je conteste en les retournant à l'envoyeur les accusations qui se rapportent à ce fantomatique double niveau, confessant là l'unique double niveau dont j'ai connaissance : celui de la magistrature qui enquête sur mon/notre compte. Le premier niveau, évident et apparemment légal, est celui adopté par les magistrats enquêteurs qui avalent les thèses qui motivent notre incarcération, et l'autre, occulte, pratiquement illégal, infâme et sordide puis-je ajouter, est celui qui se dédie en pratique à la falsification de preuves et à la mystification d'une lutte et d'une pensée, lancé par la police judiciaire (cf. la Digos et les Ros de Viterbo et Rome).

Ces mystifications et actions infâmes font partie intégrante de notre dictature démocratique qui trouve dans la prison le lieu elle peut donner libre cours à sa vraie nature persécutrice. C'est ici à Le Vallette, comme dans n'importe quelle prison, que des milliers de détenus sont enfermés, à la merci de leurs gardiens. C'est dans ce lieu que j'ai été le 11 octobre le protagoniste involontaire d'un épisode que je vais vous raconter.

Je vais, accompagné du garde qui " prend soin " de ma censure, retirer un paquet à mon casier. En entrant, je sens une pointe dans l'abdomen puis, à peine ai-je le temps de réaliser, que c'est justement celui qui devait me confier le paquet qui m'a appuyé un couteau sur le ventre. Arrivés là et sans vouloir jeter trop d'huile sur le feu, je lui conseille seulement de ne plus se permette de faire une chose pareille. Il me répond qu'il est étonné que le couteau n'ait pas pénétré. J'attendais aussi une réaction des deux autres, qui semblent ne s'apercevoir de rien. De retour en cellule, la rage continue de monter, et alors que je me rends en promenade, je croise à nouveau l'assistant qui m'avait accompagné au courrier, avec lequel je discute brutalement. Sa version est qu'il ne s'est rendu compte de rien.
Le lendemain, on me notifie l'avis de rétention d'une lettre dans laquelle je raconte l'épisode. Je réponds que je refuse de signer une telle notification, affirmant que cette rétention est une sale manœuvre pour ne pas faire connaître ce qui s'est passé. Et je m'en vais. Le lendemain, je suis appelé pour un entretien avec le directeur en personne qui, bardé du code pénal, clame la légalité de la séquestration de la lettre et prétend qu'il ne s'acharne pas contre moi. En même temps, il m'informe avoir fait suivre une plainte au parquet de Turin, rapport au fait en question. Je lui réponds que je ne crois pas à leur justice et que je n'ai dénoncé personne. C'est tout.

Cet épisode n'est qu'un de ceux qui arrivent dans ces lieux infâmes. Pour ma part, aucun pas en arrière, sinon un encou-ragement supplémentaire pour désirer une société libre, libérée des barreaux et des verrous.

Un salut rebelle !
Tittarello

[Traduit d’anarcotico.net du 6 novembre 2004]