Lourdes condamnations de quatre compagnons
La sentence en première instance est tombée à propos des faits qui se sont déroulés lors de la manifestation de février 2003 contre la guerre et contre la construction de logements pour l'Otan. Trois compagnons [de Bologne], Andrea, Gabri et Stefania ont pris 3 ans et 6 mois de prison pour vol aggravé [rapina aggravata] et coups et blessures, Salvo a pris 3 ans et 10 mois pour les mêmes délits mais avec des circonstances agravantes pour les coups et blessures. Les accusations sont basées sur la disparition d'une caméra des flics et un coup reçu par un de ces aspirants réalisateur de préfecture. La sentence sera effective en mars 2007, et c'est là qu'il sera décidé de faire appel ou pas.
Texte reçu le 21 décembre 2006
********************
Le 22 février 2003 se déroulait à Ferrara une manifestation régionale contre la construction de logements pour les soldats de l’OTAN et contre la guerre en Irak. Depuis le début du cortège, parti piazza Castello derrière la banderole “on ne laissera pas en paix ceux qui font la guerre”, le contenu est plutôt offensif. Une marionnette avec le dessin d’un molotov et la question “c’est ton dernier mot ? On l’allume ?” attire l’attention et nombreux sont ceux qui le reproduisent sur les murs de la ville. On se déchaîne pour dire sur tous les tons la rage contre cette énième violence du monde occidental qui exporte avec la guerre sa démocratie du profit et de l’exploitation. Tout au long du parcours, la mobilisation est active et imaginative et non pas l’habituel défilé qui n’est rempli que de slogans. Il y a de nombreuses réactions aux tentatives permanentes des flics en civil de rester à l’intérieur du cortège avec leurs caméras, comme s’il était normal de défiler ensemble.
Arrivés devant la structure où doivent être construits les logements, la manif s’arrête. Les banderoles et les tracts sont accrochés au grillage qui entoure le lieu tandis que d’autres cherchent à l’abattre pour y pénétrer. Il y a plusieurs moments de tension et de pression face au mur des forces de l’ordre qui cherchent à nous en interdire l’accès. Un peu de bousculades, rien de plus. A la fin, tout le monde s’éloigne pour rentrer chez soi. A ce moment-là, quelqu’un s’énerve de la présence, encore à l’intérieur du cortège, de policiers avec leur caméra ; il naît une bagarre et la caméra tombe par terre. En fin de manif, deux manifestants sont fouillés, l’un est durement frappé et ils portent plainte contre lui pour “dommages”.
A partir de l’épisode de la caméra s’ouvre l’enquête qui finira par impliquer quatre compagnons de Bologne. D’après les actes, on comprend comment a été montée l’accusation : les photos du cortège ont été envoyées à Bologne et la Digos [police politique], reconnaissant des personnes connues, les a désignées comme les individus à poursuivre. Fin mars 2003, tous quatre reçoivent des mesures restrictives [proveddimenti restrittivi], une sorte de mise en résidence surveillée partielle : obligation quotidienne de pointage, de rester dans la commune de Bologne, de désigner un lieu d’habitation, de ne pas s’en éloigner de 14h à 19h (les considérant certainement comme des horaires à risque pour manifester !) et de communiquer tous les matins au moment du pointage en détail tous les déplacements de la journée à venir. Cette situation demeurera jusqu’en juin, avant que les restrictions ne diminuent et soient ôtées vers la mi-août. L’accusation est de braquage aggravé [rapina aggravata], parce qu’ils disent que la caméra a disparu, de blessures graves (un flic et un inspecteur de la Digos se sont fait faire des ITT suite à une contusion) et dommages aggravés (tags sur des murs blancs, des commerces et une cabine électrique). La notion d’aggravation est liée à la participation groupée aux actes reprochés.
Les jours suivants, les médias de Ferrara donnent un bruyant écho aux faits, créant un climat très pesant et insolite dans cette ville. Bien sûr, n’ont pas manqués les dissociations de ceux qui s’opposent aux désastres de la société du capital en souhaitant un monde meilleur qui devrait arriver en convainquant les puissants d’être un peu plus “humains”. Le renvoi en jugement a été fixé le 17 novembre 2004 et le procès a commencé en novembre 2005. Les flics contusionnés ont déjà témoigné sur les faits en confirmant leur reconstruction, tandis que les compagnons ne se sont pas présentés devant la cour. Le 12 octobre 2006 est prévue, selon toute vraisemblance, le rendu, vu qu’il n’y a plus de témoins à écouter.
Extrait du communiqué signé Imputati e compagni solidali [les inculpés et compagnons solidaires] lu lors de l’Assemblée publique contre l’état de guerre permanent et la militarisation de la vie quotidienne qui s’est tenue à Bologne le 3 octobre 2006.